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Analyse d’une photographie : autour de l’image d’Atget


Des lectures orientées de la photographie d’Atget

À l’issue de cette analyse succincte de l’image, il convient de s’interroger sur la lecture que peut en faire un spectateur actuel, c’est-à-dire sur la possibilité d’une lecture anachronique comme moyen d’aller vers l’œuvre et, en retour, sur la capacité de la photographie d’Atget à produire du sens pour analyser la ville contemporaine.
Walter Benjamin, dans L’Œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, dit d’Atget qu’il a "photographié ces rues comme on photographie le lieu d’un crime". Il compare la prise de vue, destinée à relever des indices à une pièce à conviction (p. 285-286). Régis Durand parle d’images de crise à propos des images photographiques, d’une "situation toujours en porte à faux, entre savoir et non-savoir, hâte et figement, opérations symboliques et dramaturgies imaginaires." (p. 37). La rue déserte de la photographie est, par son vide même, le lieu de tous les possibles. Beaucoup des photographies d’Eugène Atget pourraient servir de cadre parisien aux enquêtes du commissaire Maigret de Georges Simenon. Ainsi dans Maigret, Lognon et les gangsters, le commissaire tend-il un piège au criminel : "J'aime mieux que l'opération se déroule dans une rue déserte. La rue Grange-Batelière fera l'affaire. Elle n'est pas longue et il sera facile de la fermer aux deux bouts."
 
En s’appuyant sur ces différents éléments (l’heure, la rue vide, la fermeture de l’horizon…), proposer de rédiger une nouvelle policière, une nouvelle fantastique ou une nouvelle réaliste ayant pour cadre la rue Saint-Bon et les rues avoisinantes photographiées par Eugène Atget.
En retenant un des trois registres précédents (policier, fantastique, réalisme), choisir une rue, formellement proche de la rue Saint-Bon : une rue étroite et de faible profondeur avec des immeubles anciens ou modernes présentant quelques décrochements. Définir les principaux éléments d’’une composition susceptible de répondre au registre retenu. Procéder à une première prise de vue :
Préférer le moment de la journée où les ombres ne s’étirent pas, où la lumière pénètre largement dans la rue sous un ciel sans nuage ou sous un ciel entièrement voilé mais lumineux.
Faire le choix d’une heure où la rue est vide ou au contraire pleine de piétons, d’automobiles.
Rechercher un emplacement pour poser le pied d’un appareil photographique argentique ou numérique qui offre une vue décentrée sur la rue et un premier plan suffisamment ouvert.
Cadrer de façon à ce que les points de fuite des lignes des immeubles convergent sur un ou plusieurs éléments architecturaux, porte, fenêtre, que des lignes verticales et horizontales scandent la composition.
Bien prendre le temps de visualiser sur le viseur ou l’écran avant de déclencher.
En prenant la photographie comme première et dernière image, comme cadre de l’histoire, réaliser, à l’aide d’une dizaine de prises de vues, un récit uniquement en images.
 

La photographie de rue aujourd’hui

L’objectif est ici de montrer la fécondité d’une représentation du paysage urbain et plus spécifiquement de la rue dans l’art contemporain. Que les artistes en question se réclament ou non d’une filiation d’Atget, il est important de comparer de façon à faire ressortir des sensibilités différentes à un siècle de distance, mais aussi des continuités, des similitudes. Rechercher sur la toile des photographes contemporains qui réalisent des images de rues : Thomas Struth, Dennis Adams, Gilbert Fastenaekens, Stéphane Couturier, Patrick Faigenbaum, Hiromi Tsuchida, Dan Graham, Nicolas Moulin… Ces photographies peuvent-elles rapprochées des photographies d’Eugène Atget ? Pourquoi ? On pourra s’intéresser plus particulièrement à la série de Nicolas Moulin Vider Paris (1998-2001) visible sur le site de la galerie Chez Valentin. Le "vide"a-t-il le même sens chez ces deux artistes ?
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