Laissez-moi pleurer, cela me soulage
Œuvres complètes illustrées d'Émile Zola. T. XI Au Bonheur des dames. Édition "ne variatur"
Émile Zola (1840-1902), auteur, Paris, E. Fasquelle, 1906.
BnF, département Littérature et Art, 4-Y2-3550 p. 297
© Bibliothèque nationale de France
« Entre elles, jamais encore elles n’avaient parlé ouvertement de Mouret. Mais ce silence même était comme un aveu de leurs secrètes préoccupations. Pauline n’ignorait rien. Après avoir lu la lettre, elle se serra contre Denise, la prit à la taille, pour lui murmurer doucement :
— Ma chère, si vous voulez que je sois franche, je croyais que c’était fait... Ne vous révoltez donc pas, je vous assure que tout le magasin doit le croire comme moi. Dame ! il vous a nommée seconde si vite, puis il est toujours après vous, ça crève les yeux !
Elle lui mit un gros baiser sur la joue. Puis, elle l’interrogea.
— Vous irez ce soir, naturellement ?
Denise la regardait sans répondre. Et, tout d’un coup, elle éclata en sanglots, la tête appuyée sur l’épaule de son amie. Celle-ci demeura très surprise.
— Voyons, calmez-vous. Il n’y a rien là dedans qui puisse vous bouleverser ainsi.
— Non, non, laissez-moi, bégayait Denise. Si vous saviez comme j’ai du chagrin ! Depuis que j’ai reçu cette lettre, je ne vis plus... Laissez-moi pleurer, cela me soulage. »
 
 

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