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L'arche ainsi achevée, on l'inscrit dans un cercle oblong passant par
chacune de ses extrémités ; l'espace enclos par cette circonférence,
c'est la terre "orbis terrae". Dans cet espace, on dessine la "mappemonde"
de façon que l'avant de l'arche regarde vers l'orient, l'arrière
vers l'occident ; disposition admirable car ainsi l'emplacement des lieux
et la succession des temps ont le même point d'origine, et la limite de
l'espace coïncide avec la fin des temps. Celui des sommets de ce cercle
oblong qui à l'avant de l'arche pointe vers l'orient, c'est le Paradis,
en quelque sorte le sein d'Abraham, comme on le verra plus loin, quand sera
décrite la Figure en Majesté. L'autre sommet, celui qui pointe
à l'occident, porte le Jugement dernier ; à droite, les élus ;
à gauche, les réprouvés. Sur son côté septentrional
est l'Enfer, où seront précipites, avec les apostats, ceux qui
ont à subir la damnation.
Autour de ce premier cercle, on en trace ensuite un second un peu plus étendu,
qui fait comme une ceinture autour du précédent ; l'espace
ainsi délimité, c'est l'air "aer". On y dispose, selon
les quatre parties du monde, les quatre saisons de l'année : à
l'orient, le printemps ; au sud, l'été ; à l'occident,
l'automne ; à l'aquilon, l'hiver. On peint le printemps comme un
petit garçon qui tient une flûte et chante. L'été
est un jeune homme en train de regarder des fleurs ; l'automne, figuré
dans l'âge mur, approche de ses narines, des fruits dont il respire l'odeur ;
l'hiver, en vieillard, mange des fruits. Tous sont représentés
à partir des hanches, chacun au milieu des éléments qui
lui sont propres.
Au printemps, les plaisirs de l'oreille ; à l'été,
ceux de la vue ; à l'automne, ceux de l'odorat ; à l'hiver,
ceux du goût... Chacune (des saisons) occupe une des quatre parties de
l'année : l'été, le haut ; l'hiver, le bas; le
printemps, la droite ; l'automne, la gauche. Dans chaque partie, parce
que chacune a deux propriétés, sont tendues deux cordes, qui,
tour à tour rapprochées, produisent une musique octuple, sur quoi
se règle l'accord de l'harmonie universelle. Le printemps est humide
et chaud ; l'été, chaud et sec ; l'automne, sec et froid ;
l'hiver froid et humide.
Dans cette même zone (de l'air), on placera les douze vents, repartis
trois par trois, entre les saisons, au-dessous de la région du ciel de
l'aether. On les peindra ailés, à partir des épaules,
et comme se précipitant de haut en bas, rangé chacun sous l'un
des douze mois. Parmi ces douze vents, quatre sont cardinaux, qui ont chacun,
de chaque côté, un collatéral. Du milieu de l'orient, souffle
Subsolanus, ayant deux acolytes soufflant avec lui, à droite Vulturnus,
à gauche Eurus. Du midi, souffle Auster ou Notus, ayant à sa droite
Euronotus ou Euroauster ; à sa gauche, Libonotus ou Austro-Africus.
Du milieu de l'occident, souffle Zephyrus ou Favonius. Il a, à sa droite,
Africus qui est Libs ; à sa gauche, Corus, qui est Argeste. Du milieu
du septentrion, souffle Aparctias, ou Septentrion, ayant à sa droite,
Circius, qui est aussi Thrasceas, ou encore Thrascias ; à sa gauche,
Borée, qui est l'Aquilon. Les vents cardinaux soufflent chacun dans une
double trompe, et chacun des autres n'en a qu'une.
Ensuite, on trace encore un autre cercle, enfermant les deux précédents ;
l'espace qu'il délimite figure la région du ciel "l'aether".
On y dispose les douze mois, selon l'ordre des saisons, et on place ensuite
les douze signes du zodiaque, de façon que chaque signe commence au milieu
d'un mois, et chaque mois, au milieu d'un signe. Ces signes se succèdent
tous les trente degrés, formant un circuit dont le commencement est au
premier degré du Bélier. Tournés en sens contraire, par
rapport au monde, ils sont couchés sur le dos, dans la direction du firmament,
à l'inverse des mois dresses de bas en haut, si bien qu'ils ont l'air
d'être debout ou de marcher sur la circonférence même du
cercle des fixes. Les mois apparaissent en dessous d'eux dans l'éther,
et l'on peut voir ainsi : tout en haut, les signes du zodiaque ; sous
ces signes, les mois ; sous les mois, les vents et sous les vents, les
saisons, disposition qui manifeste l'admirable organisation de la nature et
ses accomplissements, et le circuit du ciel se trouve ainsi parfaitement réalisé.
La "machine de l'univers" ainsi construite, on place à sa partie
supérieure, une Figure en Majesté, dépassant depuis
les épaules vers le haut et des pieds vers le bas et comme assise
sur un trône. Dans ses deux bras grands ouverts, elle semble embrasser
tout ce qui précède. Elle étend trois doigts vers
le cercle de la terre, avec les autres repliés vers la paume, elle
enferme les cieux. Dans la main droite, elle tient un trône qui
descend obliquement à travers la zone de l'air jusqu'au-dessus
du sommet inférieur de la terre, là où, nous l'avons
dit, on voit ressusciter les élus que des anges attendaient pour
les emporter vers le ciel. Aussi, est-il inscrit sur le trône :
"Venez les bénis de mon père, entrez en possession du royaume
qui vous est préparé depuis la création du monde."
(Math., XXV, 34.)
Dans la main gauche, elle porte un sceptre qu'elle pointe vers le bas
jusqu'au lieu où des démons se jettent au-devant des méchants
qui ressuscitent pour les emporter avec eux ; aussi, le sceptre porte-t-il
cette inscription : "Allez maudits au feu éternel qui a été
préparé pour le diable et ses anges." (Math., XXV, 41.)
Une ligne représentant l'ordre de la création jusqu'à
Adam monte depuis l'arche à travers l'angle supérieur du
monde jusqu'au plus haut du ciel ; six petites roues y sont alignées
dont la plus basse recouvre l'entrée de l'arche. Elles signifient
les travaux des six jours de la création. La première qui
doit être figurée tout en haut représente ce qu'était
le monde à son premier jour, lorsque fut créée la
lumière ; la seconde, le moment où le firmament fut
posé entre les eaux et les eaux. La troisième, lorsque les
eaux furent rassemblées et la terre recouverte de végétation ;
la quatrième, quand le soleil, la lune et les étoiles furent
créés ; la cinquième, lorsque les poissons furent
places dans l'eau, et les oiseaux dans l'air ; la sixième,
le moment ou les animaux et l'homme furent créés sur la
terre. Tout doit être disposé de façon que, de la
parole sortant de la bouche de la figure en majesté, découle
l'ordre entier des créatures et que l'arche, dans son étendue,
rejoigne le moment de la création et celui de la fin des temps :
portant de part et d'autre, contrées, montagnes, fleuves, châteaux
et places fortes ; et l'Égypte au sud et Babylone au nord.
On représente ensuite, de chaque côté du trône,
deux séraphins dont les ailes déployées voilent,
en haut, la tête, en bas, les pieds de la Figure, mais en laissant
visible son visage. Sous leurs ailes, dans l'espace entre celles-ci et
les épaules de la Figure, on place neuf rangées d'anges,
ceux-ci tournés pour la contempler, vers la face de la Figure divine.
Elle-même, véritable et suprême unité, occupe
le centre et le sommet de l'ensemble ; à ses côtés,
les rangs des anges portant diadèmes, deux de part et d'autre pour
le premier, trois pour le second, quatre pour le troisième... dix
pour le neuvième, sont disposes de façon à manifester
que tout s'origine dans l'unité première.
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