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À
son très cher père David, Matthieu, son fils dans le corps
et l'esprit, salut et bénédiction filiale. Ne vous étonnez
pas, ne vous irritez pas si vous recevez de moi de fréquentes lettres
exprimant mes plaintes. Auprès de qui se réfugierait en
effet le malade si ce n'est auprès du médecin, l'ami auprès
de l'ami, le fils auprès du père. Assurément, si
un père néglige son fils, s'il le renie, il n'est plus désormais
son père. Votre bienveillance sait assurément que lorsque
vous m'avez envoyé aux écoles, vous m'avez laissé
partir avec seulement quatre sous à remettre au maître, vous
ne m'avez pas donné le nécessaire et le suffisant en fait
de vêtements, et vous ne m'avez depuis rien envoyé d'autre ;
peut-être faisiez vous confiance à la bénignité
de maître Hilaire [d'Orléans], vous qui ne l'avez jamais
obligé en rien. Celui-ci cependant m'a procuré une bonne
pension mais n'a pas voulu ou pas pu me fournir de vêtements. Par
suite du froid trop rigoureux que j'ai supporté en hiver, je suis
tombé longuement malade. J'ai alors perdu assurément beaucoup
de temps pour mes études. Je suis alors allé trouver maître
Hilaire, suppliant et en larmes. Par la grâce de Dieu, j'ai enfin
recouvré la santé et autant que j'ai pu j'ai repris mes
études. Mais maintenant, en cette période estivale, alors
que tous mes camarades sont bien vêtus, je suis nu et je rougis
de confusion de ma nudité. Certes, si le maître ne m'avait
retenu, à plusieurs reprises je me serais caché. Je supplie
votre bienveillance paternelle de m'envoyer les vêtements qui conviennent
et de m'inciter à l'amour de l'étude par vos bienfaits.
Si vous négligez de ce faire, vous me contraindrez assurément
par votre négligence à la fuite. Portez-vous bien. |
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Publié dans Sources d'histoire médiévale (IRHT, CNRS éditions, p. 596-597)
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