Chartes de franchise de Clermont en Auvergne
(14 mai 1198 et septembre 1199)
  La première charte de commune de Clermont date de 1219. Le comte Guy stipulait qu'en échange du droit pour la communauté urbaine de s'assembler et de faire "ce qui lui appartient", les citoyens devraient garder les murs et les tours et curer les fossés. Auparavant, des chartes de franchise avaient été accordées à la ville. La première année par l'évêque et l'année suivante par le comte. Ces deux chartes témoignent de la lutte entre le comte et l'évêque, ce dernier restant le maître de la ville du XIIIe siècle à la fin du Moyen Âge.
    
 
 

La charte de franchise donnée par l'évêque Robert de Clermont, 14 mai 1198

Moi Robert, par la grâce de Dieu, évêque de Clermont, promets en toute bonne foi à tous les hommes et les femmes de Clermont présents et futurs que :
1) Je ne ferai saisir ni leurs personnes, ni leurs maisons, ni leurs biens ni ne souffrirai que ce soit fait, sauf pour cause d'homicide, d'adultère ou de meurtre, dans lesquels l'homme ou la femme seraient mêlés. Pour les voleurs, on suivra les "bonnes coutumes" de Montferrand.
2) Si "claim" (clamor) est faite devant nous venant d'un homme ou d'une femme, il nous donnera d'abord des sûretés et des témoins, s'il le peut, ou sinon l'homme ou la femme jurera sur les biens qu'il aura dans la cité.
3) Si moi ou un homme de ma maison a une querelle contre quelqu'un, s'il ne veut donner de sûreté, il sera jugé sur ses biens.
4) Je promets que tous les biens qui seront mis en sûreté à Clermont en temps de paix ou en temps de guerre n'auront aucun danger à courir de notre part ni de nos hommes, ils ne seront saisis ni par celui qui les tiendra, ni par celui chez qui ils seront déposés, et celui qui les y aura mis, pourra les emporter quand il voudra.
5) Ni moi ni quelqu'un d'autre ne doit donner de sauf-conduit, dans la cité ou le bourg, à aucun homme qui a volé ou attaqué un homme de Clermont, sauf avec le consentement de celui à qui il aura été fait tort.
6) Je promets enfin à tous les hommes et les femmes de Clermont présents et futurs que je tiendrai les "bonnes coutumes" que mes ancêtres ont tenues de leurs ancêtres ; et si j'ai quelque querelle moi-même ou venant de mes prédécesseurs envers un homme ou une femme de Clermont je pardonne à tous et à chacun à partir du jour d'aujourd'hui.
7) Je promets de garder toutes ces clauses en bonne foi et je jure sur saints évangiles et nos bayles jurent aussi.
8) Et qu'ils me pardonnent de bon cœur si je leur ai manqué un jour de foi, pour des raisons de terre ou de dette.
9) Et pour que ces clauses soient fermes et assurées, nous avons fait sceller cette charte de notre sceau et de celui du chapitre de Clermont.
Ce fut fait l'an de l'incarnation de Notre-Seigneur 1198, au mois de mai, à l'octave de l'Ascension.



La charte de franchise donnée par le comte d'Auvergne, septembre 1199

Sachent tous présents et à venir que nous citoyens de Clermont nous avons fait un accord avec le comte Guy selon lequel il tiendra et prêtera serment pour les droits et coutumes qui ensuivent.
1) Le comte ne fera saisir ni nos personnes, ni nos maisons, ni nos biens ni ne souffrira que ce soit fait, sauf pour cause d'homicide, d'adultère ou de meurtre. Pour les voleurs, on suivra les "bonnes coutumes" de Montferrand.
2) Si "claim" (clamor) est fait devant le comte, il donnera d'abord des sûretés et des fidéjusseurs, si le coupable le peut, ou sinon il jurera et après avoir juré il ne sera pas tenu de donner des sûretés et des fidéjusseurs, et il sera jugé sur les biens qu'il aura dans la cité.
3) Si le comte ou un homme de sa maison a une querelle contre quelqu'un, s'il ne veut donner de sûreté ou de fidéjusseurs, il sera jugé sur ses biens, qui ne pourront cependant ni être pris ni être saisis avant que la cause soit entièrement terminée.
4) Tous les biens qui seront mis en sûreté à Clermont en temps de paix ou en temps de guerre n'auront aucun danger à courir de la part du comte ou de ses hommes, ils ne seront saisis ni par celui qui les gardera, ni par celui chez qui ils seront déposés, et celui qui les y aura mis, pourra les emporter quand il voudra.
5) Ni le comte ni quelqu'un d'autre en son nom ne doit donner un sauf-conduit, dans la cité ou le bourg. à aucun homme qui a volé ou attaqué un homme de Clermont, sauf avec le consentement de celui à qui il aura été fait tort.
6) Si le comte a quelque querelle pour lui-même ou venant de ses prédécesseurs envers un homme ou une femme de Clermont, il l'a oubliée à partir du jour de cet acte.
7) Si un homme ou une femme veut s'en aller de Clermont, il devra emporter ses biens dans l'espace de 40 jours. Le comte lui fournira le sauf-conduit dans la mesure du possible, et fera régner la paix sur ses maisons et ses biens après son départ.
8) Personne de Clermont ne donnera le péage ou le prix pour le sauf-conduit, mais le comte le fournira dans la mesure du possible.
9) Si un homme ou une femme dépose une plainte contre un homme ou une femme, pour la plainte il devra payer 3 sous ; s'il s'agit de sang, fait par une épée ou d'une autre façon, le condamné sera forcé de payer 60 sous ; et le procès sera ainsi terminé sans autres frais. Personne appartenant à la famille du comte ne pourra témoigner contre un habitant de Clermont.
10) Les bouchers et les boulangers du comte doivent faire crédit trois mois, en acceptant les gages et les garants qui leur sont fournis, et au bout des trois mois ils peuvent vendre les biens déposés en gage.
11) Le comte a promis de garder toutes ces clauses en bonne foi et a juré sur saints évangiles et il a fait jurer les bayles qu'il a installés à Clermont de même.
12) Il a fait sceller cette charte de coutumes de son sceau et le roi de France a promis aussi de le sceller.
Nous Guy comte nous le protégerons contre tous les hommes, sauf le droit et la foi donnée au roi de France, parce qu'il a lui-même promis de nous protéger et défendre contre tous, sauve la foi du roi de France.
Ce fut fait l'an de l'incarnation de Notre-Seigneur 1199, au mois de septembre, sous le règne de Philippe.

 
 

Roger Sève, "Les franchises de Clermont à la fin du XlIe siècle", dans Mélanges Clovis Brunel, t. Il, 1955, p. 534-535. Traduction de la langue d'oc.