Mois de janvier


Livre d'heures de Marguerite d'Orléans, France (Paris), vers 1430
Paris, BnF, département des manuscrits, Latin 1156B, fol. 1

Janvier est le mois du froid où l'on ne peut guère travailler. C'est aussi le mois des fêtes et du repos près du feu. De Noël jusqu'aux Rois, il y avait plus d'un prétexte à banquets. Les calendriers de la fin du Moyen Âge abandonnent souvent la figure traditionnelle du paysan à table et figurent un bourgeois qui festoie. La vaisselle d'étain témoigne d'un intérieur citadin et aisé. Plus rarement, l'iconographie de ce mois, reprenant des modèles antiques, reproduit l'image du dieu romain Janus, en particulière faveur aux XlIe et XllIe siècles. L'opposition entre passé et présent, en relation avec le caractère bifrons du dieu, est en général soulignée dans les calendriers sculptés par deux visages différents, d'un côté un vieillard, de l'autre un jeune homme. Ici, c'est le modèle du bourgeois attablé qu'a sélectionné l'enlumineur : sur une table à tréteaux, couverte d'une nappe blanche damassée, sont disposées les nourritures essentielles du Moyen Âge : le pain, sous forme de miches rondes et de lichettes, le vin (que désignent un pichet d'étain et le verre – vide – que porte le buveur à sa bouche), la viande, servie en abondance, et le sel (une salière d'étain est à main droite du convive). Ni cuiller, car la viande est grillée, sans bouillon, ni fourchette, pas encore inventée, mais un grand couteau à trancher, disposé manche vers le dîneur : il s'agit bien d'un bourgeois, qui se sert lui-même, car un noble aurait disposé d'un écuyer tranchant. S'il n'est fait aucune allusion au motif antique de Janus, on en perçoit encore l'écho au fait que le dîneur boit et mange en même temps, une lichette de pain dans une main, un verre à la bouche de l'autre.

Le verseau, comme son nom l'impose, verse de l'eau sur l'herbe d'un jardin fleuri qu'il arpente, en caleçon, une cruche de terre sur l'épaule. Le soleil, en amorce, éclabousse la scène de lumière et explique la brume d'humidité qui semble s'élever du sol, soulignée par le pointillisme de l'artiste. Sa posture contournée, ses jambes à l'équerre, triangulent la scène.