Casse-Noisette : bataille contre l'armée des souris
Histoire du prince Casse-Noisette et du Roi des Souris, illustration page 25
Ernst Theodor Amadeus Hoffmann (1776-1822), auteur ; C. Offlerdinger, dessinateur, Paris, Ed. Jouvet, 1883.
In-4°, 32 p.
BnF, département Littérature et Art, 4-Y2 PIECE-122
© Bibliothèque nationale de France
Casse-noisette est un des contes fantastiques les plus connus d'Hoffmann. La version d'Alexandre Dumas (1844) est devenue un classique de la littérature jeunesse. Elle a inspiré un ballet à Tchaïkovski, qui est aujourd'hui encore joué dans le monde entier.
Le soir de Noël, Marie et Fritz attendent impatiemment de découvrir quels jolis jouets articulés le parrain Drosselmeier, à la perruque de verre, leur a fabriqués. Au moment de se coucher, les pantins prennent vie et entraînent Marie dans une histoire trépidante. Casse-noisette est le nom d'un des pantins, dont la mâchoire brise les coques, et qui se révèlera être un héros dans la bataille contre l'armée de souris.
« Elle ferma l’armoire, et voulut se rendre dans la chambre à coucher. Alors on entendit tout autour un murmure, un chuchotement, un léger bruit, tout bas, tout bas, derrière le poêle, derrière les chaises, derrière l’armoire. La pendule gronda toujours de plus en plus fort ; mais elle ne pouvait pas sonner.
Marie leva les yeux vers l’horloge. Le grand hibou qui la dominait avait abaissé ses ailes, qui couvraient tout le cadran, et il avait allongé sa vilaine tête de chat au bec crochu ; le grondement continuait, et l’on y distinguait ces mots : "— Heures, heures, heures, heures ! murmurez doucement : le roi des souris a l’oreille fine. Purpurr, poum, poum ! chantez seulement, chantez vos vieilles chansons ! Purpurr, poum, poum ! frappez, clochettes, frappez, c’est bientôt fait !" Et la clochette, sourde et enrouée, fit douze fois poum, poum ! […] Mais alors il s’éleva de tous côtés un bruit de fous rires et de sifflements, et l’on entendit bientôt trotter et courir derrière les murailles comme des milliers de petits pieds, et mille petites lumières brillèrent à travers les fentes du parquet. Mais ce n’étaient pas des lumières : c’étaient de petits yeux flamboyants, et Marie remarqua que des souris paraissaient de tous côtés. Bientôt tout autour de la chambre on courait au trot, au trot, au galop, au galop ! Des amas de souris de plus en plus distinctes couraient ça et là ventre à terre, et se plaçaient à la fin en rang et par compagnie, comme Fritz le faisait faire à ses soldats quand ils devaient aller à la bataille. […] Tout à coup Casse-Noisette se leva, jeta sa couverture loin de lui, se dressa sur le lit à pieds joints, et s’écria d’une voix retentissante : "— Knack, knack, knack ! souris au bivouac vaut à peine une claque ! Quel micmac dans le sac ! Cric crac !…" Puis il tira son petit sabre, l’agita en l’air et s’écria : "— Chers vassaux, frères et amis ! voulez-vous me venir en aide dans la bataille acharnée ?" »