Alfred Guesdon (1808-1876), dessinateur ; Théodore Müller (1819-1879), lithographe, 1849.
Patriarche d'une des grandes familles de Florence, érudit et idéaliste, Philippe Strozzi sait que pour sa part il n'a pas agi assez tôt contre la tyrannie. Il est le seul à être dans la confidence de Lorenzo, et tout en doutant de sa capacité à tuer le tyran, l’encourage à cette action inespérée.
Acte III, scène 3
« PHILIPPE. Il faut nous délivrer des Médicis, Lorenzo. Tu es un Médicis toi-même, mais seulement par ton nom ; si je t’ai bien connu, si la hideuse comédie que tu joues m’a trouvé impassible et fidèle spectateur, que l’homme sorte de l’histrion. Si tu as jamais été quelque chose d’honnête, sois-le aujourd’hui. Pierre et Thomas sont en prison.
LORENZO. Oui, oui, je sais cela.
PHILIPPE. Est-ce là ta réponse ? Est-ce là ton visage, homme sans épée ?
LORENZO. Que veux-tu ? dis-le, et tu auras alors ma réponse.
PHILIPPE. Agir ! Comment ? je n’en sais rien. Quel moyen employer, quel levier mettre sous cette citadelle de mort, pour la soulever et la pousser dans le fleuve ? quoi faire, que résoudre, quels hommes aller trouver ? je ne puis le savoir encore. Mais agir, agir, agir ! Ô Lorenzo ! le temps est venu. N’es-tu pas diffamé, traité de chien et de sans-cœur ? Si je t’ai tenu, en dépit de tout, ma porte ouverte, ma main ouverte, mon cœur ouvert, parle, et que je voie si je me suis trompé. Ne m’as-tu pas parlé d’un homme qui s’appelle aussi Lorenzo, et qui se cache derrière le Lorenzo que voilà ? Cet homme n’aime-t-il pas sa patrie, n’est-il pas dévoué à ses amis ? Tu le disais, et je l’ai cru. Parle, parle, le temps est venu. »
Alfred de Musset,
Lorenzaccio
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