Marcel Proust vers 1895
Louis-Napoléon Bonaparte, 2 décembre 1851
1 estampe : lithographie en camaïeu ; 39 x 50,5 cm
BnF, département des Estampes et de la photographie, RESERVE QB-370 (131)-FT4
© Bibliothèque nationale de France
Le 2 décembre 1851, le président de la République Louis-Napoléon Bonaparte organise un coup d’État afin de garder le pouvoir, alors que son mandat de quatre ans prend fin et qu’il ne peut pas se représenter. Cet acte contraire à la Constitution marque le passage de la IIe République au Second Empire.
Contrairement au récit détaillé de la révolution de Février 1848, le coup d'État de 1851 occupe seulement une demi-page dans L'Éducation sentimentale de Flaubert. Brisé par la vente aux enchères des effets des Arnoux, Frédéric prête peu attention aux événements. L'assassinat de Dussardier, fidèle à la République, par Sénécal, devenu un partisan de Louis-Napoléon Bonaparte, est suivi d'un saut temporel : une ellipse de quinze ans. Dans le chapitre suivant, on découvre un Frédéric vieilli.

III, V
« Honteux, vaincu, écrasé, il retourna vers le chemin de fer, et s'en revint à Paris.
Son cocher de fiacre assura que les barricades étaient dressées depuis le Château-d'Eau jusqu'au Gymnase, et prit par le faubourg Saint-Martin. Au coin de la rue de Provence, Frédéric mit pied à terre pour gagner les boulevards.
Il était cinq heures, une pluie fine tombait. Des bourgeois occupaient le trottoir du côté de l'Opéra. Les maisons d'en face étaient closes. Personne aux fenêtres. Dans toute la largeur du boulevard, des dragons galopaient, à fond de train, penchés sur leurs chevaux, le sabre nu ; et les crinières de leurs casques et leurs grands manteaux blancs soulevés derrière eux passaient sur la lumière des becs de gaz, qui se tordaient au vent dans la brume. La foule les regardait, muette, terrifiée.
Entre les charges de cavalerie, des escouades de sergents de ville survenaient, pour faire refluer le monde dans les rues.
Mais, sur les marches de Tortoni, un homme, – Dussardier, – remarquable de loin à sa haute taille, restait sans plus bouger qu'une cariatide.
Un des agents qui marchait en tête, le tricorne sur les yeux, le menaça de son épée.
L'autre alors, s'avançant d'un pas, se mit à crier :
– Vive la République !
Il tomba sur le dos, les bras en croix.
Un hurlement d'horreur s'éleva de la foule. L'agent fit un cercle autour de lui avec son regard ; et Frédéric, béant, reconnut Sénécal.

Gustave Flaubert, L’Éducation sentimentale, 1869.
>Texte intégral dans Gallica


III, VI
« Il voyagea.
Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l'étourdissement des paysages et des ruines, l'amertume des sympathies interrompues. Il revint. »

Gustave Flaubert, L’Éducation sentimentale, 1869.
>Texte intégral dans Gallica
 
 

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