Conversation avec le moine du Mont-Saint-Michel
Le Horla
Guy de Maupassant (1850-1893), auteur ; William Julian-Damazy (1865-1910), illustrateur ; Georges Lemoine, Paris, P. Ollendorff, 1908.
BnF, département Littérature et Art, 8-Y2-53673
© Bibliothèque nationale de France
Dans la nouvelle Le Horla de Maupassant, l’épisode du mont Saint-Michel semble n’être qu’une digression narrative, une échappatoire pour le narrateur qui sent la folie de gagner. Cependant, la description de ce « bijou de granit » orné « de chimères, de diables, de bêtes fantastiques, de fleurs monstrueuses » et l’évocation de légendes moyenâgeuses attaché au lieu renforcent la dimension fantastique du récit.

« 2 juillet. — Je rentre. Je suis guéri. J'ai fait d'ailleurs une excursion charmante. J'ai visité le mont Saint-Michel que je ne connaissais pas. […]
Et le moine me conta des histoires, toutes les vieilles histoires de ce lieu, des légendes, toujours des légendes. […]
Je dis au moine : « Y croyez-vous ? »
Il murmura : « Je ne sais pas. »
Je repris : « S'il existait sur la terre d'autres êtres que nous, comment ne les connaîtrions-nous point depuis longtemps; comment ne les auriez-vous pas vus, vous? comment ne les aurais-je pas vus, moi ? »
Il répondit : «Est-ce que nous voyons la cent millième partie de ce qui existe? Tenez, voici le vent, qui est la plus grande force de la nature, qui renverse les hommes, abat les édifices, déracine les arbres, soulève la mer en montagnes d'eau, détruit les falaises, et jette aux brisants les grands navires, le vent qui tue, qui siffle, qui gémit, qui mugit, — l'avez-vous vu, et pouvez-vous le voir? Il existe, pourtant.
Je me tus devant ce simple raisonnement. Cet homme était un sage ou peut-être un sot. Je ne l'aurais pu affirmer au juste; mais je me tus. Ce qu'il disait là, je l'avais pensé souvent. »
 
 

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