Promenade en mer
Pierre et Jean
Guy de Maupassant (1850-1893), auteur ; Albert Lynch, illustrateur ; Ernest Duez, illustrateur, Paris, 1888.
Boussod, Valadod et Cie, éditeurs
BnF, Réserve des livres rares, RES G-Y2-14
© Bibliothèque nationale de France
Pierre et Jean (1888) est l’histoire d’un drame familial, celui de la bâtardise. Lorsque le Maréchal lègue son héritage à Jean, son frère Pierre comprend que sa mère a été infidèle et que Jean est le fils de Maréchal. Faisant éclater la vérité, Pierre se retrouve peu à peu exclu de la famille. Le début du roman est resté célèbre pour son juron initial permettant de faire entrer directement le lecteur dans la partie de pêche organisée par les Roland. « "Zut !" s’écria tout à coup le père Roland qui depuis un quart d’heure demeurait immobile, les yeux fixés sur l’eau, et soulevant par moments, d’un mouvement très léger, sa ligne descendue au fond de la mer. Mme Roland, assoupie à l’arrière du bateau, à côté de Mme Rosémilly invitée à cette partie de pêche, se réveilla, et tournant la tête vers son mari : "Eh bien !… eh bien !… Gérôme !" Le bonhomme furieux répondit : "Ça ne mord plus du tout. Depuis midi je n’ai rien pris. On ne devrait jamais pêcher qu’entre hommes ; les femmes vous font embarquer toujours trop tard." Ses deux fils, Pierre et Jean, qui tenaient, l’un à bâbord, l’autre à tribord, chacun une ligne enroulée à l’index, se mirent à rire en même temps et Jean répondit : "Tu n’es pas galant pour notre invitée, papa." M. Roland fut confus et s’excusa : "Je vous demande pardon, madame Rosémilly, je suis comme ça. J’invite des dames parce que j’aime me trouver avec elles, et puis, dès que je sens de l’eau sous moi, je ne pense plus qu’au poisson."