L'île d'Utopie
Utopia
Thomas More (1478-1535), Louvain, ed. Thierry Martens, 1516.
19 x 13,5 cm
BnF, Bibliothèque de l'Arsenal, 4 J 109
© Bibliothèque nationale de France
En toute rigueur, l’histoire de l’utopie ne commence qu’au début du XVIe siècle puisque c’est en 1516 que Thomas More fait paraître son Court traité sur la meilleure forme de gouvernement, qu’il situe sur une "île nouvelle, appelée Utopie". Avec ce texte, le grand humaniste anglais invente le mot et, par là même, fonde un genre littéraire. Le concept est cependant plus ancien que le mot, et puise à des racines très profondes. L’homme, face à sa condition sur terre, s’est toujours plu à imaginer des mondes meilleurs : dans un lointain passé, un lointain avenir ou un ailleurs plus ou moins accessible.
Mais si l’utopie proprement dite naît à la Renaissance, c’est parce qu’elle traduit une manière de penser caractéristique de l’humanisme : chez More comme chez la plupart de ses successeurs, la société idéale peut être une construction humaine, sans qu’il faille compter sur la Providence divine ou sur un changement surnaturel. C’est sur terre que l’utopie peut être envisagée, en prenant les hommes comme ils sont.
La première édition de l’Utopia de Thomas More juxtapose une illustration de l'île d'Utopie et un échantillon de son alphabet qui ajoutent une dimension exotique au pays fictif de More.
Sur l'île, l'inscription indique la ville d'Amaurote ainsi que la fontaine et le fleuve Anydrie.
L'alphabet s'accompagne d'un poème, qui est traduit en latin plus bas : "Utopus, mon souverain, m'a transformée en île, moi qui jadis n'étais point une île. Seule de toutes les contrées, sans le secours de la philosophie abstraite, j'ai représenté pour les mortels la cité philosophique. De bonne grâce, je partage mes bienfaits avec d'autres ; volontiers, j'adopte des autres ce qu'ils ont de mieux."