Projet d'un palais royal
Palais d'un souverain conçu à Saint-Germain
Étienne-Louis Boullée (1728-1799).
Plan en petit. Pl. 21
BnF, département des Estampes et de la Photographie, Ha 56, ft 7
© Bibliothèque nationale de France
De grands projets idéaux, apparemment irréalisables, ont valu à Boullée, Ledoux et Lequeu l’épithète d’architecte utopique. Boullée est l'un des grands architectes visionnaires du XVIIIe siècle. Il s'impose comme théoricien et pédagogue durant la Révolution.
Nombreux sont les projets de Boullée qui s'attachent à mettre en scène l'exercice du pouvoir, dans ses expressions les plus variées, voire complémentaires.
Le projet de palais idéal pour un souverain, sur le site du château de Saint-Germain-en-Laye, lieu de naissance de Louis XIV date de 1785. À cette époque le château de Saint-Germain appartenait au comte d’Artois dont l’architecte Bélanger proposait des plans de reconstruction grandiose. Encore plus idéal, le projet de Boullée pour le même site est avant tout une démonstration théorique sur l’architecture royale.
Destiné à l’habitation du souverain, entourée des palais de ses courtisans, ce gigantesque projet prévoit également des bâtiments pour l’éducation des princes et trace à travers le village de Nanterre et les bois du Vésinet un large canal qui "formerait un miroir magnifique où se reproduiraient, de mille et mille manières différentes, toutes les richesses de la nature". Inspiré par les pensées de Montaigne sur l’éducation, Boullée veut créer une familiarité entre les élèves et leurs maîtres. Il accompagne les résidences de locaux destinés aux Académies des arts et des sciences et établit des bâtiments pour "former la jeunesse aux exercices du corps".
Ce projet montre l'influence de la pensée philosophique et politique des Lumières sur la conception du pouvoir monarchique. Ce thème de l’éducation, étendu aux individus citoyens et au peuple, appelé à découvrir ses droits et ses devoirs civiques en jouissant du bonheur qu'apportent l’usage des premiers et le respect des seconds, est le motif récurrent des édifices administratifs et législatifs que Boullée projette avec une égale magnificence.
Les formes et les monuments imaginés par Boullée ne sont pas des abstractions surgies ex nihilo de son esprit mais elles prétendent renouer avec l’Antiquité dont elles donnent une vision idéale. Sensible à l'émotion causée par le contour des corps géométriques purs dont il recommande les effets immédiatement perceptibles, Boullée assigne à l'art de l'architecture des vertus thérapeutiques ou plutôt cathartiques : l'architecture, dit-il, "est un art bienfaiteur qui maîtrise nos sens par toutes les impressions qu'il y communique".
 
 

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