L'outrage au corps du héros mort
Achille traînant le corps d'Hector
Déroulé du lécythe. Peintre de Diosphos. Athènes, vers 490 av. J.-C. Lécythe à figures noires. H. 21,80 cm.; d. 7,60 cm. Provenance : Érétrie. Acquisition, 1893
Musée du Louvre, Antiquités grecques, étrusques et romaines, CA 601
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Achille, le plus vaillant des combattants grecs, est profondément affecté par la mort de son ami Patrocle, tombé sous les coups du héros troyen Hector. Achille affronte ce dernier dans un duel terrible. Les dieux ayant abandonné Hector à son sort, le vainqueur attache son cadavre à son char pour le soustraire à la "belle mort" et le priver des honneurs rendus aux héros guerriers morts au combat. Seule l'intervention de Priam - il vient supplier le héros grec de lui rendre la dépouille de son fils - permettra aux Troyens de ramener le corps d'Hector dans la cité pour des funérailles dignes de lui.
Le lécythe, vase contenant des huiles parfumées, de forme souvent cylindrique et allongée, à col étroit, était utilisé lors des rites funéraires en Grèce ancienne. L'huile et le parfum servaient à enduire le corps du défunt avant l'inhumation ou la crémation. L'iconographie est associée à la mort. Une interprétation possible y lirait le fantôme (eidolon) ailé de Patrocle encourageant Achille à outrager le cadavre d'Hector, traîné par le char conduit par Automédon, le cocher d'Achille. Devant l'attelage, Achille "aux pieds légers" entraîne l'ensemble du cortège tragique dans une dynamique fougueuse soulignée par le serpent chtonien, porteur des valeurs du monde souterrain. Autre possibilité, trois morts figurées dans une même scène, relatées dans trois épisodes différents de l'Iliade : Achille sur son char traîne le corps mort d'Hector ; Achille à côté du char se retourne vers le fantôme de Patrocle en lui promettant de le venger ; enfin, devant l'attelage, Achille court vers son destin, c'est-à-dire la mort prochaine que son cheval Xanthos lui annonce en baissant la tête.