Les savoirs de l'Orient
   
   
    
  L'expansion de l'islam
  L’ère musulmane – appelée l’"hégire"* – commence en 622, quand le prophète Mahomet (570-632) quitte La Mecque pour Médine où il lance un appel à la conquête islamique. En un siècle, les Arabes vont bâtir un immense empire, de l’Espagne jusqu’en Inde.
En pleine expansion, l’Empire islamique transfère sa capitale de Damas à Bagdad au VIIIe siècle et assimile les cultures qu’il rencontre, aussi différentes que celles de la Perse et de Byzance. Encouragé et organisé officiellement par les califes* abbassides*, un important mouvement de traduction en arabe se développe alors. Médecine, logique et philosophie grecques, littérature persane, astronomie indienne… Synthétisées à travers l’islam, elles font émerger une nouvelle culture philosophique et scientifique arabe : c’est l’adab*.
    
  Un syncrétisme culturel
  L’adab entraîne un nouvel essor des savoirs en général, et de la science en particulier. Les IXeet Xe siècles sont la période faste de la culture "encyclopédique" arabe qui se répand dans tout le monde musulman, et jusqu’en Occident. Ishâq ibn Hunayn (809-873), l’un des traducteurs les plus remarquables, transcrit ainsi tout le corpus médical de Galien (131-201) et d’Hippocrate (460-377 av. J.-C.), préparant le Canon de médecine d’Avicenne (980-1037), une encyclopédie médicale qui sera traduite en latin et fera autorité durant cinq cents ans. À la fois médecin, astronome, mathématicien, physicien, géographe et historien, al-Bîrûnî (973-1048) décrit l’histoire de l’Univers dans la tradition grecque. Au Xe siècle, al-Fârâbî (872-950) donne une interprétation d’Aristote (384-322 av. J.-C.) et de Platon (428-348 av. J.-C.) qui harmonise les deux philosophies.

    


    

 

La classification des Arabes repose sur celle d’Aristote qui ordonne la totalité du savoir de l’Antiquité. Les savants arabes imitent et complètent les traités du philosophe grec. Sous son influence, ils s’attachent à comprendre l’Univers, classer les connaissances, et tenter une synthèse entre le savoir sacré et les savoirs profanes. Averroès (1126-1198), le grand commentateur arabe d'Aristote, démontre au XIIe siècle les liens entre Révélation et philosophie.
    

  Une radicalisation du savoir
Il y a cependant des résistances à l’intégration dans la pensée musulmane de la philosophie et des sciences grecques. La thèse fondamentale d’Aristote sur l’éternité du monde soulève de fortes oppositions. Des théologiens comme al-Ghazâlî (1058-1111) taxent d’infidélité tous ces philosophes qui interprètent les Lois révélées. Cette problématique est partagée par les savants juifs : le grand code législatif civil et religieux de Maimonide (1135-1204) s’oppose à la philosophie religieuse rigoriste de Ben Gikatilla (1248-1325).
Tout au long de cette période de confrontation, les savants des deux écoles créent une œuvre riche et variée, restée fondamentale pour l’histoire des civilisations. Malgré le pouvoir d’assimilation de l’islam, la lutte se termine au XVe siècle par la victoire des conceptions plus purement islamistes, à l’origine d’une société ordonnée par la sharia, la "Loi sainte" élaborée par les juristes fondamentalistes à partir du Coran... Au moment même où l’Occident renonce à une interprétation strictement chrétienne du monde.