Produits commerciaux
   
    
  Luxe et produits courants
Le grand commerce en Méditerranée consiste surtout en produits de luxe : aromates, écaille, ambre, perles, pierres précieuses, étain de Malaisie, armes des Indes… Dans les comptoirs africains de la côte transitent des esclaves, l’or du Ghana, l’ivoire et des bois précieux exportés vers les grands relais caravaniers du Maghreb*. La Russie et l’Asie centrale fournissent aussi des esclaves et du bois, des fourrures et du miel. D’Extrême-Orient sont importées épices, soieries, pierres précieuses et porcelaines. Un petit commerce transporte d’une étape à l’autre des biens de consommation courants : huile, céréales, poisson salé, produits fabriqués ou exotiques en transit, comme le sel ou les dattes d’Afrique.
Dès le XIe siècle, une partie du trafic d'al-Andalus* et du Maghreb vers la Syrie et l’Égypte est effectuée par des navires étrangers, surtout italiens. Depuis l’Occident musulman ou chrétien, ces derniers exportent de la poix, du fer et d’autres métaux, du bois et des tissus solides comme les draps de laine. En retour, ils importent les produits orientaux de grand luxe si convoités en Europe, des tissus par exemple, nommés d’après leur lieu de production : "damas" de Damas, "baldaquin" de Bagdad, "mousseline" de Mossoul, "gaze" de Gaza.
    
  Épices

Poivre, cannelle, clous de girofle, noix de muscade, safran, gingembre, sucre de canne, voire plantes médicinales et tinctoriales comme l'alun*…, les épices et les aromates sont très recherchés, autant en Orient qu’en Occident. Ils arrivent par caravanes depuis l'Arabie, l'Inde et l'Extrême-Orient vers les ports du Levant – les "échelles" – et sont convoyés en Occident par les marchands italiens. Faciles à acheminer, ces denrées de luxe procurent de gros bénéfices, malgré leur lourd prix d'achat.
    

  Esclaves

Au Moyen Âge, les musulmans possèdent beaucoup d’esclaves. Ce sont des prisonniers de guerre et des enfants volés ou achetés sur des marchés spécialisés. Trois grandes zones alimentent le trafic : l’Afrique noire, l’Asie des steppes turques, l’Europe orientale slave. Selon leur origine, les esclaves sont affectés à des fonctions différentes. Les Noirs sont destinés aux travaux domestiques, les femmes comme concubines ou nourrices ; les Slaves occupent des emplois variés auprès de l’aristocratie, parmi eux sont choisis les eunuques ; les Turcs sont appréciés comme soldats.
   

  Tissus

Comme en Occident chrétien, la fabrication des tissus occupe la première place dans l’activité industrielle et commerciale du monde musulman médiéval. Largement dispersés sur un territoire très étendu, les textiles conjuguent de multiples influences, de la Chine à Byzance*. Ils jouent un rôle primordial dans la vie de l’Orient musulman : nécessaires pour l’habillement et la demeure des pauvres comme des riches, ils constituent l’élément indispensable du luxe. En Sicile, l’atelier du Tiraz est directement rattaché au palais de Roger II*.
Le monde musulman utilise quatre grands textiles : la laine et le lin, connus depuis l’Antiquité, le coton et la soie, introduits plus tardivement.
   

Des tissus lourds et chauds, destinés à l’ameublement ou à l'habillement, sont fabriqués en laine. Les grandes régions de tissage correspondent aux zones d’élevage du mouton et sont liées au nomadisme. Dans le bassin méditerranéen, l’Afrique du Nord est de loin le plus gros producteur, suivie par al-Andalus* et l’Égypte. En Orient, l’Arménie tisse les fameux tapis et coussins exportés vers la Mésopotamie et Byzance. Toutes les grandes régions de steppes désertiques sont encore productrices et exportatrices.

Souple et résistant, le lin est la plus ancienne plante textile employée. Cultivé dans les plaines alluviales, il est aussi utilisé pour son huile. L’Égypte, où le lin était planté dès l’époque pharaonique, est la plus grosse région productrice. Ses manufactures confectionnent des étoffes d’une grande variété, parfois mêlées de soie, commercialisées et imitées dans tout l’Islam. En Orient, la basse Mésopotamie domine le marché et fournit les célèbres manufactures du Fârs et du Khûzistân. La production restant insuffisante, le monde musulman importe du lin d’Italie, de Dalmatie et de l’Empire byzantin.

Plante des régions chaudes et pluvieuses, le coton est originaire d’Inde. Il est introduit au VIIe siècle en Syrie et se répand en Afrique du Nord et en Espagne où il concurrence le lin. La Syrie est le plus grand fournisseur cotonnier de la Méditerranée en qualité et en quantité. En Orient, la Mésopotamie l'exporte vers Mossoul où sont fabriquées les fameuses mousselines. Elle produit des manteaux avec un coton écru ou teinté d’un jaune safran, des turbans et des châles exportés dans tout le Moyen-Orient. Néanmoins, du coton brut et tissé est importé d’Inde pendant tout le Moyen Âge.

Tissu précieux par excellence, la soie est importée de Chine. Au VIe siècle, la sériciculture s’est répandue en Méditerranée à partir de la Syrie, important producteur exportateur. Elle est pratiquée massivement en Espagne qui joue un rôle important dans la confection et l’exportation en pays musulmans ou chrétiens de tissus de grand luxe. Brochée sur du coton, la soie donne de somptueux brocards brodés à Damas, Tyr, Antioche ou Tripoli, comparables à ceux de l’Empire byzantin. Byzance devient le principal fournisseur en soie du monde musulman, qu'elle importe en grande quantité.


Al-Idrîsî signale également d’autres fibres végétales ou animales, comme le chanvre, utilisé pour faire des toiles fortes ou des cordages, ou les joncs avec lesquels sont tissées des nattes. Les nomades fabriquent des manteaux, tentes ou tapis très épais et très chauds avec des poils de chèvre et de chameaux.