Transmission des savoirs
   
   
    
  De l'arabe au latin
 

La science arabe, et la médecine en particulier, représentent aux Xe et XIe siècles un ensemble de connaissances sans équivalent dans le monde occidental. Reprise aux Arabes en 1085, Tolède devient un lieu de contacts féconds entre culture arabe et monde chrétien. Les clercs latins et les savants juifs s’emploient activement à traduire nombre d’ouvrages médicaux arabes pour y puiser les bases d’un savoir qui leur fait défaut. C’est ainsi qu’au milieu du XIIe siècle, Gérard de Crémone (1114-1187) vient d’Italie à Tolède pour diriger les traductions latines de quelque soixante-dix grands textes scientifiques et philosophiques gréco-arabes, dont le fameux Canon de médecine d’Avicenne (980-1037). Par la suite, les échanges seront constants et les traductions innerveront toute la chrétienté occidentale.
   

     
    
  Le rôle d'Averroès

En transmettant la pensée d’Aristote (384-322 av. J.-C.) dans l’Occident latin, Averroès (1126-1198)  va bouleverser la hiérarchie chrétienne des savoirs. Médecin et cadi de la grande mosquée de Cordoue, Averroès veut retrouver la véritable doctrine d’Aristote. Analysant ses traités, il rejette toutes les interprétations antérieures pour développer son propre commentaire. Au terme de ses travaux, Averroès considère la théologie comme inutile au philosophe pour qui la vraie science doit être démonstrative. Sa théorie de l’intelligence va même séparer radicalement la raison de la foi, rejetant autant la théologie de l’islam que celle du christianisme.
Les commentaires d’Averroès sont traduits en latin au début du XIIIe siècle. Ils soulèvent des débats passionnés qui trouvent autant de disciples que d’opposants. Relevant de deux ordres de vérités contraires, la tendance à séparer foi et raison risquait de ruiner les efforts de ceux qui voulaient au contraire les concilier à travers Aristote. Les principes d’Averroès, considérés comme dangereux, seront finalement condamnés par l’Église en 1240, puis à nouveau en 1513. C’est dire l’influence considérable du philosophe arabe en Occident.
    

  Manuscrits rapportés de Constantinople
 

Au XVe siècle, savants et philosophes s’efforcent de retrouver l’authenticité de la pensée des Anciens, perdue sous les multiples adaptations et interprétations chrétiennes. Ils étudient les langues anciennes – grec, hébreu, latin classique, syriaque – et recherchent des manuscrits dans tout le monde méditerranéen. Le cardinal Bessarion (1400-1472) a déjà rapporté de Constantinople un ensemble de manuscrits grecs, dont la Géographie de Ptolémée (90-168). La prise de la capitale byzantine par les Ottomans* en 1453 amplifie ce mouvement : de nombreux réfugiés emportent avec eux des manuscrits anciens. Les versions arabes ou chrétiennes d’Aristote sont peu à peu abandonnées au profit de traductions nouvelles à partir du grec. On redécouvre ainsi les œuvres complètes de Platon (428-348 av. J.-C.). La Renaissance humaniste est en route.