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Bible d’Alcalá, dite Polyglotte d’Alcalà

Genèse XXIV, 14-28 : rencontre d’Éliezer et de Rébecca
Bible d’Alcalá, dite Polyglotte d’Alcalà
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À la Renaissance, la représentation médiévale de saint Jérôme sous les traits d’un homme de repentir voué à l’ascèse cède la place à l’image d’un humaniste chrétien adonné à l’érudition biblique. C’est sur cette nouvelle représentation que Francisco Jimenez de Cisneros (1436-1517), à l’instar de Didier Érasme, façonne sa propre image. Un moment ermite, archevêque de Tolède en 1495, puis cardinal en même temps qu’homme politique et érudit, Jimenez décida de fonder à Alcalá (Complutum en latin), près de Madrid, une université consacrée aux trois langues bibliques anciennes, l’hébreu, le grec et le latin. Il compose sa Bible polyglotte sur le modèle des Hexaples d’Origène, qui au 3e siècle avait présenté la bible sur six colonnes (le texte hébreu et les différentes versions grecques). C’est en s’appuyant sur cet ouvrage aujourd’hui disparu que Jérôme aurait établi le texte de la Vulgate.

Il commence par réunir une importante équipe éditoriale et se procure tous les manuscrits anciens disponibles. L’impression des six volumes a lieu entre 1514 et 1517, le texte grec y trouve sa première apparition imprimée. Le format est identique à celui de la Bible de Gutenberg. La mise en page y fait l’objet d’une élaboration particulière : au centre, une étroite colonne reproduit le texte latin de la Vulgate de saint Jérôme, comparé dans le prologue au Christ en croix flanqué des deux voleurs, à savoir, le texte hébreu dans la marge extérieure, le texte grec dans la marge intérieure, tous deux jugés spirituellement imparfaits, le premier étant associé au judaïsme, le second à l’orthodoxie grecque !

Le texte grec est établi à partir de la Septante pour l’Ancien Testament et à partir du grec original pour le Nouveau Testament. Chaque mot grec est surmonté de sa traduction latine pour permettre la comparaison avec le texte de la Vulgate. Chaque mot du texte hébreu est surmonté de minuscules latines renvoyant au mot correspondant dans le texte latin, dispositif ingénieux destiné à éviter de faire figurer le texte latin à l’envers, la syntaxe de la langue hébraïque étant fort différente de la syntaxe latine (on peut le repérer car les minuscules au-dessus des mots apparaissent dans un ordre altéré sur le texte de la Vulgate). Dans la marge extérieure sont notées les racines des mots composés hébreux cités dans le texte. Dans le premier volume, la version araméenne du Pentateuque hébreu, ou « Targoum d’Onkelos », a été rajoutée dans la marge basse, ici abusivement baptisée « traduction chaldéenne », accompagnée d’une traduction littérale en latin.

Cette entreprise éditoriale s’adresse aux spécialistes, elle s’attache à restaurer les textes originaux, parfois même à les corriger, mais toujours à partir du texte latin, et non pas l’inverse. Elle témoigne de l’éblouissante érudition des hommes de la Renaissance, de ce moment de grâce où naît, dans la ferveur du retour aux sources, la critique des textes, juste avant qu’elle ne dégénère en violentes polémiques.

Bibliothèque nationale de France

  • Date
    1514-1517
  • Lieu
    Alcalá, Espagne
  • Auteur(es)
    Cardinal Francisco Jimenez de Cisnero (1436-1517), éditeur scientifique ; Arnaldo Guillén de Brocar (14..-1523), éditeur
  • Description technique
    Titre complet : Vetus Testamentum multiplici lingua nunc primo impressum. Et imprimis Pentateuchus Hebraico Greco atque Chaldaico idiomate. Adjuncta unicuique sua Latina interpretatione
    6 tomes en 5 volumes ; in-fol, 38,5 x 28 cm
  • Provenance

    BnF, bibliothèque de l’Arsenal, FOL-T-1 (1), fol. rr iiii 

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm121200162z