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Un jeune sauvage C'était au temps que les arbres fleurissent, que les bocages se couvrent de feuilles et les prés d'herbe verte, alors que dès l'aube les oiseaux chantent doucement en leur latin et que toute créature s'enflamme de joie. Le fils de la dame veuve, au cœur de la Gaste Forêt solitaire où elle a sa demeure et son domaine, se leva, vivement mit la selle sur son cheval de chasse et prit trois javelots. Ainsi équipé, il sortit du manoir de sa mère et se dit qu'il irait voir les herseurs de la dame, à l'œuvre dans les avoines avec leurs douze bœufs et leurs six herses. Il entre donc en la forêt et, tout aussitôt, son cœur se réjouit en lui pour la douceur du temps et le joyeux ramage des oiseaux : car tout cela lui plaisait. |
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Il fait si beau et si calme qu'il ôte le frein de son cheval et le laisse errer à son gré et paître par la jeune herbe verdoyante. Et lui, habile qu'il était à darder le javelot, il allait lançant de tous côtés ceux qu'il portait, en avant, en arrière, en haut, en bas, tant qu'il entendit, dans les profondeurs du bois, des chevaliers qui venaient, armés de toutes pièces. | |
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Chrétien de Troyes, Perceval le Gallois ou le Conte du Graal, vers 1185, traduction de Lucien Foulet (La Légende arthurienne, Laffont, "Bouquins", 1989, p. 8) |
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