La Habanera : « L'Amour est un oiseau rebelle. » (Acte I, scène 5)
Carmen, opéra-comique en quatre actes, tiré de la nouvelle de Prosper Mérimée. Livret de Meilhac et Halévy.
Georges Bizet (1838-1875), compositeur, 1872.
Partition d'orchestre, manuscrit autographe
BnF, département de la Musique, MS-436 (9) f. 178
© Bibliothèque nationale de France
Sombre, concise, sans enflure, la nouvelle quasi naturaliste de Prosper Mérimée, centrée sur un personnage intuitif et primitif, fut considérablement affadie par l’adaptation de Meilhac et Halévy, deux professionnels de l’opérette, qui ajoutèrent la blonde et pure Micaëla et le bien conventionnel toréador. Les personnages principaux sont méconnaissables : don José passe mal en héros naïf et Carmen a souvent des réflexions de midinette.
Malgré ce traitement, l’accueil houleux du public et de la critique lors de la création de l’Opéra-Comique, le 3 mars 1875, indique en Carmen une œuvre nouvelle, troublante, dont la musique rapide et contrastée transcende ce que le livret peut avoir de convenu. L’ouvrage, réclamé la même année par l’opéra de Vienne, fut transformé en « ‘grand opéra » par les récitatifs d’Ernest Guiraud – Bizet étant mort – et tient l’affiche dans le monde entier. De nos jours, si l’on revient au texte parlé original, les musicologues continuent à se disputer sur la Carmen authentique, entre la partition manuscrite utilisée à la création, l’édition piano-chant de Choudens avec des coupures approuvées par Bizet et ce manuscrit autographe qui porte bien des modifications, les unes du compositeur, les autres postérieures – dont les fameux récitatifs.
La page présentée ici est extraite de la séguedille de la fin du premier acte, dans laquelle Carmen séduit définitivement don José. Elle semble bien de la main de Bizet, qui corrige au crayon bleu un motif de la deuxième flûte et transforme le texte bien naturaliste de « J’irai dimanche en voiture… » en « Près des remparts de Séville… » qui « sonne » plus opéra-comique.