Jean Veber (1868-1928), graveur, 1897.
Lithographie en coul. ; 58 x 44,5 cm (f.)
Les Chants de Maldoror d'Isidore Ducasse, dit le comte de Lautréamont, est un long poème en prose, un délire hallucinatoire. L’araignée est un des motifs récurrents de cette œuvre de la fin du XIX
e siècle.
« Chaque nuit, à l'heure où le sommeil est parvenu à son plus grand degré d'intensité, une vieille araignée de la grande espèce sort lentement sa tête d'un trou placé sur le sol, à l'une des intersections des angles de la chambre. Elle écoute attentivement si quelque bruissement remue encore ses mandibules dans l'atmosphère. Vu sa conformation d'insecte, elle ne peut pas faire moins, si elle prétend augmenter de brillantes personnifications les trésors de la littérature, que d'attribuer des mandibules au bruissement. Quand elle s'est assurée que le silence règne aux alentours, elle retire successivement, des profondeurs de son nid, sans le secours de la méditation, les diverses parties de son corps, et s'avance à pas comptés vers ma couche. Chose remarquable ! moi qui fais reculer le sommeil et les cauchemars, je me sens paralysé dans la totalité de mon corps, quand elle grimpe le long des pieds d'ébène de mon lit de satin. Elle m'étreint la gorge avec les pattes, et me suce le sang avec son ventre. »
Lautréamont,
Les Chants de Maldoror, chant V, 1869.
>Texte intégral dans Gallica : Paris, 1869