Les Bédouins vus par Joinville
 
  • Quel aspect des Bédouins paraît particulièrement choquant à Joinville ?
  • Quelle vision des Francs ont les Bédouins d'après Joinville ?
  • D'après la description de Joinville, à quoi peut-on penser qu'il assimile les Bédouins ?
 

 

Les Bédouins ne demeurent ni dans des villages ni dans des cités, ni dans des châteaux, mais ils couchent toujours dans les champs. Et ils installent leurs serviteurs, leurs femmes, leurs enfants, le soir pour la nuit, ou de jour quand il fait mauvais temps, dans des sortes de tentes qu'ils font avec des cercles de tonneaux attachés à des perches, comme sont les chars des dames ; et sur ces cercles ils jettent des peaux de mouton que l'on appelle peaux de Damas, préparées dans l'alun. Les Bédouins eux-mêmes ont de grandes pelisses de ces peaux qui leur couvrent tout le corps, les jambes et les pieds.
Quand il pleut le soir et qu'il fait mauvais temps la nuit, ils s'enveloppent dans leurs pelisses, et ôtent les brides de leurs chevaux, et les laissent paître à côté d'eux. Et quand arrive le lendemain, ils étendent leurs pelisses au soleil et les frottent et les apprêtent ; et il ne paraîtra en rien qu'elles aient été mouillées le soir. Leur croyance est telle que nul ne peut mourir qu'à son jour, et pour cela ils ne veulent pas d'armes défensives. Et quand ils maudissent leurs enfants, ils leur disent : "Ainsi sois-tu maudit comme le Franc qui s'arme par peur de la mort." Au combat, ils ne portent rien que l'épée et la lance.
Presque tous sont vêtus d'un surplis, comme les prêtres. Leurs têtes sont entortillées de linges qui leur passent par-dessous le menton, ce qui les rend gens très laids et hideux à regarder, car les cheveux de leur tête et les poils de leur barbe sont tout noirs. Ils vivent du lait de leurs bêtes, et achètent dans les plaines appartenant à des hommes de haut rang les pâturages dont vivent leurs bêtes. Leur nombre, personne ne saurait le dire, car il y en a dans le royaume d'Égypte, dans le royaume de Jérusalem et dans toutes les autres terres des Sarrasins et des païens, à qui ils rendent chaque année de grands tributs.

Jean de Joinville, Vie de Saint Louis.

   
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