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Allégories et bestiaires médiévaux

Les représentations allégoriques des arts libéraux : Des vierges sages

Les sept disciplines des arts libéraux sont au Moyen Âge l'objet d'innombrables représentations allégoriques. Ainsi au tympan du portail royal de la cathédrale de Chartres on voit la Sagesse siégeant au milieu des personnifications du trivium et du quadrivium et de leurs représentants dans l'enseignement des arts et des sciences : Donat, Cicéron, Aristote, Boèce, Euclide, Pythagore, Ptolémée. Assimilés aux sept piliers de la demeure de la Sagesse, ou à sept ruisseaux irrigués par la Fontaine de la Sagesse, ils sont aussi souvent représentés sous forme de vierges hiératiques dotées chacune d'attributs spécifiques.

La Grammaire souvent placée au pied de l'arbre est parfois armée d'une double trousse de chirurgien et de mécanicien de la phonétique remplie des instruments appropriés à l'orthopédie des organes du son et au polissage des phonèmes. Parfois elle tient simplement des verges (ou une férule) et un livre. Ici elle est représentée sur le mode d'une vierge allaitant dans une attitude plutôt sacerdotale, comme une mère nourricière. Ne contient-elle pas en elle tous les germes de l'art du langage ?

La Rhétorique emblématisée par Cicéron est parfois dotée d'un faisceau de lances et d'un bouclier, parfois simplement d'un stylet et d'une tablette de cire.

La Dialectique dont le modèle est Aristote (ou parfois Platon) est presque toujours accompagnée de serpents symbolisant la ruse de ses arguments insidieux et la morsure de son intelligence (« Dialectica mordet »).

La Géométrie tient souvent à la fois le compas et la sphère car elle est la soeur de l'Astronomie. Ici elle est munie d'un bâton rappelant sans doute le roseau d'or avec lequel dans l'Apocalypse Jean mesure le temple et l'ange la Nouvelle Jérusalem.

L'Arithmétique telle qu'elle est représentée dans les manuscrits carolingiens dévide entre ses doigts une corde à boules, évocation de la bouillonnante dextérité des doigts computateurs de l'arithmétique.

La Musique illustrée par Pythagore, inventeur du nombre d'or, est évidemment le plus souvent munie d'un instrument de musique (harpe, lyre ou cythare) et s'affaire à monter la gamme en frappant des clochettes avec un marteau.

L'Astrologie rappelle l'importance des horoscopes et évoque l'ascendant des astres sur la formation de l'amour et de la haine. Elle tient ici un cadran solaire et contemple la
giration des astres autour de la planète Terre.


Ces trois images sont extraites de l'ouvrage :
Institutones Specularum litterarum de Cassiodore, 1330-1340.
Paris, BnF

Des bestiaires pour édifier le chrétien

Le terme bestiaire fait son apparition au début du XIIe siècle et désigne des ouvrages en vers ou en prose utilisant la description de certains animaux réels ou légendaires, en vue d'un enseignement moral et religieux. Il s'agit à la fois de manuels sommaires d'histoire naturelle et d'abrégés de doctrine chrétienne illustrée.

Les bestiaires dépeignent un monde manichéen déchiré entre le Bien et le Mal, entre Dieu et le diable. La description des animaux n'y intègre aucun souci réaliste, elle se conforme essentiellement à une tradition et obéit à une structure constante, où l'énoncé de la « nature » de l'animal permet de dégager une signification religieuse et morale proposée à l'édification.

Ainsi les bestiaires constituent-ils « un arsenal de métaphores énonçant les natures de Dieu et un support mnémotechnique rappelant les figures possibles du Mal ».(Gabriel Bianciotto, Bestiaires du Moyen Âge).

La licorne et l'âne sauvage peuvent servir d'emblème à ce double propos.

Des propriétés de la licorne.

« Il existe une bête qui est appelé en grec « monocheros », c'est à dire en latin « unicorne ».
Physiologue dit que la nature de la licorne est telle qu'elle est de petite taille et qu'elle ressemble
à un chevreau. Elle possède une corne au milieu de la tête, et elle est si féroce qu'aucun homme
ne peut s'emparer d'elle, si ce n'est de la manière que je vais vous dire :
les chasseurs conduisent une jeune fille vierge à l'endroit où demeure la licorne
et ils la laissent assise sur un siège, seule dans le bois.
Aussitôt que la licorne voit la jeune fille, elle vient s'endormir sur ses genoux.
C'est de cette manière que les chasseurs peuvent s'emparer d'elle
et la conduire dans les palais des rois.
De la même manière, Notre Seigneur Jésus - Christ, licorne céleste, descendit dans le sein de la Vierge,
et à cause de cette chair qu'il avait revêtue pour nous il fut pris par les Juifs et conduit devant Pilate.»

Pierre de Beauvais, Bestiaire.

Des propriétés de l'âne sauvage.

« Il existe une bête appelée âne sauvage, dont Physiologue dit qu'au vingt-cinquième jour de mars,
il brait douze fois la nuit, et autant de fois le jour.
De cette manière, il est possible de savoir que l'on est le jour de l'équinoxe,
car les ânes sauvages sont parfaitement capables d'indiquer le chiffre des heures par leurs braiments.
L'âne sauvage est le symbole du Diable, car lorsqu'il sent que le jour et la nuit sont égaux,
c'est à dire quand il voit le peuple qui demeurait dans la nuit,
c'est à dire dans le péché, se tourner vers Dieu [ ],
c'est alors que brait l'âne

Pierre de Beauvais, Bestiaire.

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