La question de l'auteur


 Brunswick

 

 

L'attribution de la mappemonde à Gervais de Tilbury, comme la datation qu'elle implique sont encore sujettes à caution. Néanmoins les liens avec le texte des Divertissements pour un empereur et surtout avec les sources auxquelles Gervais a pu puiser – Isidore de Séville, Aethicus Ister, Honorius Augustodunensis – paraissent indéniables.
Mais quel qu'en soit l'auteur et quels que soient ses liens, directs ou indirects, avec Gervais de Tilbury, il s'agit d'un érudit – les légendes sont en latin –, certainement un clerc, pétri de la culture issue des écoles parisiennes qui rayonnait alors en Europe, en Angleterre comme sur le continent. En même temps, il s'avère connaître remarquablement, comme en témoigne la mappemonde, le milieu local, tant sur le plan politique qu'économique, autour de Brunswick, Lunebourg et Ebstorf.
   

 

 

 

Qui est Gervais de Tilbury ?


Gervais de Tilbury (1155-1234) fait partie d'un groupe de clercs originaires des îles Britanniques. Assidus à la cour de Henri II Plantagenêt (1154-1189), ces clercs forment un cercle culturel autour de son fils, Henri le Jeune Roi, couronné du vivant de son père en 1170. Tous sont passionnés par la "philosophie naturelle", cette découverte de la Nature en tant que force qui régit le cours du monde physique, héritage immédiat de la "renaissance" du XIIe siècle initiée dans les écoles parisiennes autour de Thierry de Chartres et de Guillaume de Conches. Ils sont tout autant férus d'histoire, mêlant les sources locales issues du fonds celtique, la tradition biblique et celle de l'Antiquité gréco-latine véhiculée par les auteurs classiques.

Gervais est né en Angleterre vers 1155. Son éducation à la cour de Henri II Plantagenêt est complétée à Reims entre 1176-1180, auprès de l'archevêque Guillaume aux Blanches Mains, oncle du roi de France Philippe II (1180-1223), le futur Philippe Auguste, puis à Bologne, grand centre d'enseignement du droit canon. À la mort brutale de Henri le Jeune Roi en 1183, alors en pleine rébellion contre son père, Gervais quitte l'Angleterre. On le retrouve en Italie du Sud, à la cour du dernier roi normand de Sicile, Guillaume II le Bon. À la mort de ce dernier en 1189, Gervais émigre en Arles, terre d'Empire, où il exerce ses talents de juriste auprès de l'archevêque et du comte de Provence et contracte un bon mariage. L'avènement d'Otton IV de Brunswick, couronné empereur à Rome par le pape le 4 octobre 1209, fait de Gervais le maréchal de la cour impériale pour le royaume d'Arles. Le nouvel empereur, formé dans sa jeunesse à la cour d'Angleterre, aime à s'entourer d'Anglais et de Saxons. C'est à son intention que Gervais termine la rédaction vers 1210 les Otia imperialia, ou Les Divertissements pour un empereur. Lorsque, vaincu à Bouvines en 1214, l'ex-empereur se retire dans ses terres de Brunswick, Gervais, tout en conservant sa charge de maréchal de la cour impériale au royaume d'Arles, séjourne à ses côtés. Demeuré en Allemagne après la mort de son protecteur, Gervais serait alors devenu prévôt d'Ebstorf de 1223 à 1234, date probable de sa mort. C'est donc pendant cette période, à la fin de sa vie, qu'il aurait supervisé la réalisation de la mappemonde sur le modèle de celle qui accompagnait, peut-être, le manuscrit des Divertissements pour un empereur.