Érection d'une nouvelle paroisse (janvier 1213)
  À certaines des églises énumérées dans La Ville aux cent clochers correspondaient des paroisses. Nous reproduisons ici l'ordonnance de Pierre de Nemours érigeant la paroisse Saint-Jean-en-Grève. Nous pouvons y saisir combien les paroisses étaient imbriquées les unes dans les autres et proches les unes des autres. Le texte nous renseigne aussi sur l'évolution de la population parisienne dans ce quartier de la Grève où la densité est et restera très importante. L'importance de ce quartier entre la Grève et Saint-Gervais était telle que Philippe Auguste se rendit maître du fief du Monceau-Saint-Gervais, qui relevait auparavant de l'évêque de Paris.
    
 
 

Pierre par la grâce de Dieu évêque de Paris, à tous ceux qui verront les présentes lettres, salut dans le Seigneur. Nous voulons faire parvenir à la connaissance de vous tous que comme par la grâce de la main de Dieu, l'église paroissiale de Saint-Gervais a tant grandi, tant par le nombre des paroissiens que par l'importance de ses revenus, que les choses divines ne peuvent être accomplies correctement par un seul curé ; nous, après en avoir considéré, afin que le culte divin augmente, ayant pris le conseil de nos "bons hommes", avec l'accord et volonté de nos chers abbés et couvent du Bec, ainsi que du prieuré et couvent de Saint-Nicaise-de-Meulan, nous avons décidé de diviser ladite église en deux : les limites seront déterminées par notre conseil et ordonnance. L'église de Saint-Gervais sera desservie par un curé et l'église de Saint-Jean [en-Grève] par un autre. Cependant en ce qui concerne la donation de Saint-Gervais à l'abbaye du Bec et au prieuré de Saint-Nicaise, nous voulons et décidons que de la même façon les deux églises leur appartiendront. L'abbé et le couvent du Bec et le prieuré et couvent de Saint-Nicaise présenteront deux personnes pour lesdites églises qui devront être libéralement acceptées. Nous voulons en outre que soit bien connu que chacune des églises sera chargée de tous les services qui appartenaient à l'église Saint-Gervais. Les possessions qu'avait l'église Saint-Gervais seront divisées en deux ; sauf que le curé de Saint-Gervais aura toujours sa maison à côté de l'église. Parce que la cure de Saint-Jean tirera son origine de la cure de Saint-Gervais, le curé de Saint-Jean sera tenu aux devoirs auxquels était tenu le curé de Saint-Gervais. D'abord il devra distribuer lors de la fête de saint Gervais et saint Protais, à l'église de Paris qui célèbre la troisième, la grand-messe et la sixième, 50 sous parisis avec 3 setiers du meilleur froment. Il devra en outre le jour de la Saint-Marc porter l'encens avec deux autres porte-encens devant la croix de l'église Notre-Dame et aussi les chanoines du chapitre dans la rue dite de la Mortellerie quand ils la traversent en procession pour aller à Saint-Paul-des-Champs. Il devra aussi donner un ou deux de ses chapelains, qui porteront le reliquaire de la Vierge le premier jour des Rogations, lors de la procession à Montmartre. De toutes ces choses, le curé de Saint-Gervais sera déchargé désormais, ainsi que ses successeurs, par le curé de Saint-Jean qui en est ainsi chargé.
Enfin le curé de Saint-Jean devra aller en procession le jour des morts au cimetière de l'église Saint-Gervais. Afin que cette division dure perpétuellement, nous avons fait écrire ces lettres et les avons fait sceller de notre sceau. Fait l'année du Seigneur 1212 au mois de janvier.

 
 

Adrien Friedmann, Paris, ses rues, ses paroisses
du Moyen Âge à la Révolution, Origine et évolution
des circonscriptions paroissiales
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Paris, PIon, 1959, annexes, p. 410. Traduction du latin.