Tous les chefs-d’œuvre
Tous les chefs-d’œuvre
Gobseck, Le Bal de Sceaux (suite et fin) ; Pierre Grassou ; Le Message
Honoré de Balzac (1799-1850), auteur ; Francisque Poulbot (1879-1946), illustrateur.
BnF, département des Estampes et de la Photographie, SNR-1 (POULBOT, FRANCISQUE)
© Bibliothèque nationale de France
Les Scènes de la vie privée sont des nouvelles, publiées dans les revues puis en recueil. Balzac entend révéler le secret des familles, lever le rideau sur les drames domestiques. L'amour, le mariage et l'argent sont au cœur de ces nouvelles — La Vendetta, La Femme de trente ans, Le Bal de Sceaux, La Femme vertueuse, Le Devoir d'une femme, Les Célibataires…. La section « Scènes de la vie privée » de La Comédie humaine comptera 27 titres.

« Il s’agit d’un usurier. Saisirez-vous bien cette figure pâle et blafarde, à laquelle je voudrais que l’académie me permît de donner le nom de face lunaire, elle ressemblait à du vermeil dédoré ? Les cheveux de mon usurier étaient plats, soigneusement peignés et d’un gris cendré. Les traits de son visage, impassible autant que celui de Talleyrand, paraissaient avoir été coulés en bronze. Jaunes comme ceux d’une fouine, ses petits yeux n’avaient presque point de cils et craignaient la lumière ; mais l’abat-jour d’une vieille casquette les en garantissait. Son nez pointu était si grêlé dans le bout que vous l’eussiez comparé à une vrille. […] Ses actions, depuis l’heure de son lever jusqu’à ses accès de toux le soir, étaient soumises à la régularité d’une pendule. C’était en quelque sorte un homme-modèle que le sommeil remontait. Si vous touchez un cloporte cheminant sur un papier, il s’arrête et fait le mort ; de même, cet homme s’interrompait au milieu de son discours et se taisait au passage d’une voiture, afin de ne pas forcer sa voix. À l’imitation de Fontenelle, il économisait le mouvement vital, et concentrait tous les sentiments humains dans le moi. Aussi sa vie s’écoulait-elle sans faire plus de bruit que le sable d’une horloge antique. Quelquefois ses victimes criaient beaucoup, s’emportaient ; puis après il se faisait un grand silence, comme dans une cuisine où l’on égorge un canard. Vers le soir l’homme-billet se changeait en un homme ordinaire, et ses métaux se métamorphosaient en cœur humain. »

Honoré de Balzac, Gobseck, 1832.
>Texte intégral dans Gallica : P. Jannet, Paris, 1853-1854
 
 

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