|
|
|
La ville de Tolède
est à l'est de Talavera. Elle a un immense territoire et une population
nombreuse. Elle est fortifiée, entourée de belles enceintes
et défendue par une citadelle très solide [...]. On voit
peu de villes qui lui soient comparables par la solidité et la
hauteur des édifices. Elle est sur une éminence, dans un
beau site fertile, au bord du grand fleuve que l'on appelle Tage. On voit
un aqueduc de construction admirable, composé d'une seule arche
au-dessous de laquelle les eaux coulent avec une grande violence et font
mouvoir une noria qui fait monter l'eau à quatre-vingt-dix coudées
de hauteur. Celle-ci est montée jusqu'au-dessus du pont, coule
sur son dos et pénètre dans la ville
Du temps des chrétiens, Tolède fut la capitale de leur empire
et le lieu où se dirigeaient leurs pas. Lorsque les musulmans conquirent
al-Andalus, ils y trouvèrent de nombreux trésors que l'on
peut à peine décrire : on y trouva cent soixante-dix
couronnes d'or enrichies de perles et de divers types de pierres précieuses ;
mille sabres royaux rehaussés de bijoux ; des perles et des
rubis par boisseaux ; différentes sortes de vases d'or et
d'argent en quantité incalculables ; la table de Salomon fils
de David, qui dit-on, était faite d'une seule émeraude et
qui est aujourd'hui à Rome.
La ville de Tolède est environnée de jardins traversés
par des cours d'eau, de roues à chapelets, de vergers productifs
qui produisent des fruits qui ne peuvent se comparer à rien d'autre
en raison de leur quantité incalculable. De tous côtés,
elle est entourée de districts magnifiques, de forteresses solides.
Al-Idrîsî, Nuzhat
al-mushtaq fî ikhtirâq al-âfâq,
encore appelé Livre de Roger. Sicile, 1154.
|