Né d'un père pasteur, à
Carlat, dans l'Ariège, Pierre Bayle fait de courtes
études à Genève. Il se convertit au catholicisme
quelque temps mais reviendra en 1670 à la religion de ses pères.
Il devient professeur d'histoire et de philosophie et obtient une
chaire à Sedan. En 1680, il part enseigner à
Rotterdam; mais ses positions de protestant peu orthodoxe l'obligent
à abandonner son poste en 1693.
Dès lors, il se consacre entièrement
à son oeuvre d'écrivain, et notamment à son
Dictionnaire historique et critique. Les longues remarques
personnelles qui ponctuent cet ouvrage révèlent un esprit singulier
et libéral. On y trouve un souci constant d'objectivité et
de tolérance et un plaidoyer passionné pour « les droits
sacrés de la conscience ». De longs articles sont consacrés
aux minorités et aux « calomniés de l'Histoire».
Avant tout érudit et critique, Bayle
semble plus proche du siècle des philosophes que de celui de Louis
XIV. Il n'a qu'un but : la découverte de la
vérité. Ce n'est pas tant le fait qui l'intéresse
que les déformations qu'il subit, les contradictions des opinions
humaines, les interprétations, les « crédulités
qui se prennent pour des vérités». Bayle estime que
l'universalité d'une croyance n'est pas forcément un gage de
sa vérité.
Esprit libre, il s'attaque à tout ce qui est
établi. Il écrit en 1686 un essai sur la religion dont le titre
est significatif : Commentaire philosophique sur les paroles de
Jésus-Christ : Contrains-les d'entrer, où l'on prouve
qu'il n'y a rien de plus abominable que de faire des conversions par contrainte.
En abordant la question de l'origine du mal, il s'attaque indirectement à
Leibniz. Celui-ci lui répondra
dansThéodicée.
Considéré aujourd'hui comme le
précurseur de toute la critique moderne, il soulève
en son temps contre lui les jésuites et même des protestants;
nombre de ses livres sont brûlés en place publique sur ordre
du roi de France. Sans se décourager devant les obstacles,
il achève en 1697 le Dictionnaire qui le rendra
célèbre et meurt en 1706, à l'âge de soixante-deux
ans.
Les encyclopédistes des Lumières salueront en Pierre
Bayle un de leurs inspirateurs et lui emprunteront sa thèse de
l'incompatibilité entre la foi et la raison. |