Le Scapin, le Matamore et le Tyran
Chiquita et le brigand
Isabelle et Vallombreuse
Le baron de Sigognac
Le Capitaine Fracasse
Théophile Gautier (1811-1872), auteur du texte ; Gustave Doré (1832-1883), illustrateur ; Charpentier, éditeur, Paris, 1866.
In-4°, 500 p.
BnF, Réserve des livres rares, RES-Y2-1003
© Bibliothèque nationale de France
Le baron de Sigognac en suivant la troupe des comédiens deviendra un des leurs sous le nom du « capitaine Fracasse ». Le début du roman le dépeint bien sombre dans son « château de la misère ».

« Le baron de Sigognac, car c'était bien le seigneur de ce castel démantelé qui venait d'entrer dans la cuisine, était un jeune homme de vingt-cinq ou vingt-six ans, quoique au premier abord on lui en eût attribué peut-être davantage, tant il paraissait grave et sérieux. Le sentiment de l'impuissance, qui suit la pauvreté, avait fait fuir la gaieté de ses traits et tomber cette fleur printanière qui veloute les jeunes visages. Des auréoles de bistre cerclaient déjà ses yeux meurtris, et ses joues creuses accusaient assez fortement la saillie des pommettes ; ses moustaches, au lieu de se retrousser gaillardement en crocs, portaient la pointe basse et semblaient pleurer auprès de sa bouche triste ; ses cheveux, négligemment peignés, pendaient par mèches noires au long de sa face pâle avec une absence de coquetterie rare dans un jeune homme qui eût pu passer pour beau, et montraient une renonciation absolue à toute idée de plaire. L'habitude d'un chagrin secret avait fait prendre des plis douloureux à une physionomie qu'un peu de bonheur eût rendue charmante, et la résolution naturelle à cet âge y paraissait plier devant une mauvaise fortune inutilement combattue.
Quoique agile et d'une constitution plutôt robuste que faible, le jeune baron se mouvait avec une lenteur apathique, comme quelqu'un qui a donné sa démission de la vie. Son geste était endormi et mort, sa contenance inerte, et l'on voyait qu'il lui était parfaitement égal d'être ici ou là, parti ou revenu. »

Théophile Gautier, Le Capitaine Fracasse, chapitre I, 1863.
>Texte intégral dans Gallica : Charpentier, 1863
 
 

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