Le paysage dans l'art pictural

Le paysage, une structure feuilletée

Nous avons tendance à croire aux données des sens. Nous percevons, croyons-nous, les choses telles qu'elles sont, de manière directe, et comme ingénument. Ainsi pensons-nous percevoir la "nature" directement, intuitivement, sous la forme perceptible du paysage. Paysage et nature ne feraient qu'un, selon le sens commun.
Nous savons bien cependant que le paysage est un fait de culture, et, spécifiquement, de culture artistique, et que la nature, elle, est principe, et au principe du devenir et du développement, et qu'elle pourrait s'appeler tout aussi bien "élan vital", par exemple. Mais ce savoir reste en dehors de nos pensées, étranger à nos comportements, isolé dans un compartiment du cerveau.
Le paysage, une invention "achevée" ? par Anne Cauquelin
 

Naissance du paysage dans l'art pictural occidental

L'homme du Moyen Âge ne cherche pas à découvrir la nature pour elle-même, mais à la déchiffrer pour y trouver l'image de Dieu. Le monde n'est qu'un monde d'apparences, de symboles, derrière lesquels se cache la vérité divine ; par là, même le paysage, l'environnement physique, et plus encore celui modelé par l'homme n'a pas de signification propre. L'espace divin est abstrait. Ce qui sera plus tard le paysage – la nature, l'air, la lumière, l'atmosphère – et qui se formera insensiblement au cours de deux siècles n'est encore qu'un fond d'aplats de couleurs pourpre, or, bleu profond, de semis d'étoiles, d'ornements à fleurons ou rinceaux, ou un fond mosaïqué à damiers, losanges et autres motifs...
La naissance du paysage, par Gisèle Lambert
Feuilleter des miniatures
 

Naissance du paysage urbain

Pas plus que le paysage rural, le paysage urbain n'est figuré dans l'iconographie médiévale. Les premières évocations pittoresques de la ville datent du début du XIVe siècle. De premiers panoramas de Paris apparaissent en arrière-plan dans des manuscrits comme le Bréviaire de Louis de Guyenne. C'est ce même panorama parisien que l'on retrouve entre 1452 et 1460 dans les Heures d'Étienne Chevalier, en arrière-plan du martyre de saint Jacques le Majeur, puis vers 1460 dans le Songe de Dagobert des Grandes Chroniques de France. Adapter une telle largeur d'horizon à l'espace restreint de la peinture a obligé l'artiste à interpréter la réalité et à tronquer certaines perspectives pour aboutir à une sorte de panorama condensé pourvu des points de repère majeurs qui permettent de reconnaître Paris mais laissent aléatoire une identification détaillée.
La naissance du paysage urbain, d'après Philippe Lorentz
 

Dessins de la Renaissance

À une époque où, de part et d'autre des Alpes, la peinture de paysage s'affirmait comme un genre autonome, Patinir, que Dürer appréciait et qualifiait de "Gut Landschaftmaster" ("bon maître paysagiste"), en fit l'essentiel de son œuvre. Paysage imaginaire et merveilleux, proche encore de celui des primitifs, et cependant très innovateur par le traitement de l'espace, de la profondeur obtenue grâce aux plans successifs parallèles, de la perspective aérienne. Souvent, dans ses tableaux aux thèmes religieux, le paysage prend une dimension essentielle.
Dürer et les dessins allemands et flamands, par Gisèle Lambert
Feuilleter des dessins de Dürer et l'école du nord
 

Quelques estampes de paysage de Rembrandt

Si Rembrandt s’est inspiré de la réalité – l’observation de la nature domine dans ses paysages –, il l’a toujours interprétée. Les paysages gravés de Rembrandt tendent essentiellement à suggérer des impressions, les particularités d’un instant, la sérénité, le bruit, le silence, le murmure du vent, le bruissement des feuillages, les effets du temps, l’humidité, la brume, le froid, la chaleur, la fraîcheur de l’ombre, tout ce qui ne peut être figuré concrètement. Sous une apparente simplicité, une dimension métaphysique s'en dégage.
Paysages et scènes de chasse
 

L'Art du jardin en Chine

Pénétrer dans un jardin chinois, c'est entrer dans la pensée chinoise et surtout dans la pensée taoïste. Le terme signifiant "paysage" est constitué de deux caractères : shan, montagne, et shui, eau, qui constituent les éléments essentiels de la peinture de paysage shanshui. Ces mêmes éléments, unis en d’infinies combinaisons, caractérisent le jardin traditionnel chinois dont ils structurent l'espace.
Yuanming Yuan, le jardin de la clarté parfaite
Vues remarquables du mont Hu
Quatre textes autour de l'art du jardin
Six textes autour du palais d'Été
 

L'Art du jardin en Perse

L'Islam est une civilisation née au bord du désert, d'où l'abondance des métaphores de fertilité végétale dans le Coran. Lianes, fleurs et branches se déploient à l'infini dans les motifs des tapis et des enluminures. Les tableaux s'inspirent des jardins persans qui émerveillèrent les visiteurs étrangers ou les envahisseurs arabes. La flore est cependant très irréaliste et les motifs sont ouvent symboliques.
La flore et la faune dans les miniatures persanes
 

Estampes de paysage au Japon

Renouer avec la nature, écouter le rythme des saisons, admirer les fleurs de pruniers ou de cerisiers, goûter la fraîcheur du soir, contempler les premières neiges, ou surprendre l’envol des grues ou des oies sauvages... conjuguant réalisme et spiritualité, observation directe et interprétation tout empreinte de shintoïsme et de bouddhisme, Hokusai et Hiroshige portent à sa perfection l’art du paysage dans l’estampe ukiyo-e.
L’avènement de l’estampe japonaise de paysage, par Jocelyn Bouquillard
Hokusai, par Jocelyn Bouquillard
Hiroshige, par Jocelyn Bouquillard
Feuilleter Les Trente-six vues du Mont Fuji : version Flash - version HTML5
Feuilleter Les Cinquante-trois relais du Tôkaidô : version Flash - version HTML5

Les Trente-six vues de la tour Eiffel

Réalisées entre 1888 et 1902, les Trente-six vues de la tour Eiffel sont l'occasion pour Henri Rivière de rendre un double hommage : à la nouvelle tour parisienne d'une part et à Hokusai dont il possédait les Trente-six vues du mont Fuji d'autre part. À l'instar du maître japonais, l'auteur joue sur la variation des cadrages et des points de vue plus ou moins rapprochés, depuis le cœur même de l'édifice jusqu'à sa silhouette qui apparaît à l'horizon.
Feuilleter Les Trente-six vues de la tour Eiffel
 
 

Groupement de textes relatifs à la notion de paysage

Pline le Jeune, François Pétrarque, Jean-Jacques Rousseau, Charles Baudelaire, Paul Claudel, François-René de Chateaubriand, Gustave Flaubert, Bernardin de Saint-Pierre, René-Louis de Girardin, Georges Sand, Marcel Proust, Arthur Conan Doyle...
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