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Cardinal
de Retz, Portrait de La Rochefoucauld Il y a toujours eu du je-ne-sais-quoi en tout M.
de La Rochefoucauld. Il a voulu se mêler dintrigue, dès son enfance, et dans un
temps où il ne sentait pas les petits intérêts, qui nont jamais été son
faible ; et où il ne connaissait pas les grands, qui, dun autre sens,
nont pas été son fort. Il na jamais été capable daucune affaire, et
je ne sais pourquoi ; car il avait des qualités qui eussent suppléé, en tout
autre, celles quil navait pas. Sa vue nétait pas assez étendue, et il
ne voyait pas même tout ensemble ce qui était à sa portée ; mais son bon sens, et
très bon dans la spéculation, joint à sa douceur, à son insinuation et à sa facilité
de murs, qui est admirable, devait récompenser plus quil na fait le
défaut de sa pénétration. Il a toujours eu une irrésolution habituelle ; mais je
ne sais même à quoi attribuer cette irrésolution. Elle na pu venir en lui de la
fécondité de son imagination, qui nest rien moins que vive. Je ne la puis donner
à la stérilité de son jugement ; car, quoiquil ne lait pas exquis dans
laction, il a un bon fonds de raison. Nous voyons les effets de cette irrésolution,
quoique nous nen connaissions pas la cause. Il na jamais été guerrier,
quoiquil fût très soldat. Il na jamais été, par lui-même, bon courtisan,
quoiquil ait eu toujours bonne intention de lêtre. il na jamais été
bon homme de parti, quoique toute sa vie il y ait été engagé. Cet air de honte et de
timidité que vous lui voyez dans la vie civile sétait tourné, dans les affaires,
en air dapologie. Il croyait toujours en avoir besoin, ce qui joint à ses Maximes,
qui ne marquent pas assez de foi en la vertu, et à sa pratique, qui a toujours été de
chercher à sortir des affaires avec autant dimpatience quil y était entré,
me fait conclure quil eût beaucoup mieux fait de se connaître et de se réduire à
passer, comme il leût pu, pour le courtisan le plus poli qui eût paru dans son
siècle. |
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Mémoires,1675-1677 |
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|L'aristocrate, l'homme de cour| |