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La
Bruyère, Les Caractères Que dites-vous ? Comment ? Je ny suis pas ; vous plairait-il de recommencer ? Jy suis encore moins. Je devine enfin : vous voulez, Acis, me dire quil fait froid ; que ne disiez-vous : " il fait froid " ? Vous voulez mapprendre quil pleut ou quil neige ; dites : " il pleut, il neige. " Vous me trouvez bon visage, et vous désirez de men féliciter : dites : " Je vous trouve bon visage. " - Mais répondez-vous, cela est bien uni et bien clair ; et dailleurs qui ne pourrait pas en dire autant ? Quimporte, Acis ? Est-ce un si grand mal dêtre entendu quand on parle, et de parler comme tout le monde ? Une chose vous manque, Acis, à vous et à vos semblables les diseurs de phoebus, vous ne vous en défiez point et je vais vous jeter dans létonnement : une chose vous manque, cest lesprit. Ce nest pas tout : il y a en vous un chose de trop, qui est lopinion den avoir plus que les autres ; voilà la source de votre pompeux galimatias, de vos phrases embrouillées, et de vos grands mots qui ne signifient rien. Vous abordez cet homme, ou vous entrez dans cette chambre ; je vous tire par votre habit, et vous dis à loreille : " Ne songez point à avoir de lesprit, nen ayez point, cest votre rôle ; ayez, si vous pouvez, un langage simple, et tel que lont ceux en qui vous ne trouvez aucun esprit : peut-être alors croira-t-on que vous en avez. |
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Les Caractères,1688. |
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|L'aristocrate, l'homme de cour| |