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Le sténopé


Le sténopé peut être considéré comme une version primitive de l’appareil photographique, une boîte noire percée d’un trou et dépourvue d’optique. Deux techniques permettent de réaliser facilement un sténopé utilisable en classe :
- La première, uniquement destinée aux boites métalliques, consiste à percer un trou minuscule avec une mèche fine au centre d’une des faces pour une boite parallélépipédique, au milieu de la hauteur pour une boite cylindrique. Bien poncer le pourtour de l’orifice pour éviter le flou dû à la diffraction de la lumière à cause des barbes métalliques. Peindre l’intérieur de la boite en noir mat. Le couvercle doit être étanche. Il est possible d’utiliser le couvercle de la boite peint en noir, il faudra alors l’entourer d’un ruban adhésif noir lors de la prise de vue pour éviter toute entrée de lumière. On peut aussi utiliser un plastique noir (du type des plastiques agricoles épais) ou une toile cirée noire maintenus par un élastique large.
- La seconde, qui peut être utilisée aussi bien avec des boites métalliques qu’avec des boites en carton, consiste à réaliser le trou en croisant quatre ou huit lames de rasoir autour d’une épingle. Les lames de rasoir sont collées et maintenues par un adhésif noir. L’ensemble est collé sur la boite préalablement trouée.
L’obturateur consiste en un morceau d’adhésif noir replié sur la moitié de sa surface pour pouvoir l’enlever et le remettre en place facilement.
Dans une pièce noire, sous lumière inactinique, coller avec de petits morceaux de ruban adhésif transparent une feuille de papier photographique (de préférence du papier baryté). S’assurer que l’obturateur est bien en place. Le sténopé est prêt à l’emploi.
Pour faire une prise de vue, poser l'appareil face au sujet et, en se positionnant derrière la boite, cadrer le champ. Avec un peu d’habitude le temps de pose peut être estimé en fonction de la lumière, sinon utiliser une cellule photoélectrique et calculer le temps de pose (des tables figurent sur les pages web citées). Le temps de pose, proportionnel à l’ouverture (la taille du trou), à la distance focale (la profondeur de la boîte) et à la sensibilité du papier photographique utilisé, soit ISO 1 et 8, est long, de deux à vingt minutes de pose selon la luminosité. Préférer une lumière diffuse sans ombres trop marquées. Les sujets en mouvement n’apparaissent qu’à l’état de trace ou d’indice. La zone de netteté s’étend de quelques centimètres à l’infini troublant ainsi les échelles et la vision en plans étagés. Un léger vignettage dû aux conditions de diffraction de la lumière dans la boite noire donne un aspect un peu onirique à la photographie.
Entre disparition et accommodation, c’est tout le geste et la temporalité de la photographie qui sont revisités. Les images acquièrent une nouvelle dimension dans la durée ouvrant ainsi les potentialités du non advenu, de la combinaison du continu et du discontinu dans les rapports complexes entre le paysage et les acteurs, entre la visibilité et l’invisibilité. Elles disent le durable et l’inattendu, la réalité et l’attente de ce qui est en passe d’être fixé ou de ne l’être pas.
L'image obtenue est un négatif sur papier qu’il faut développer. Le positif est ensuite réalisé par contact, donc dans les mêmes dimensions que le négatif, le négatif posé à l’envers sur une feuille de papier photographique vierge, le tout placé sous une plaque de verre. L’exposition se fait à l’aide d’une ampoule ou du néon de la classe ou sous la lampe d’un agrandisseur. Le temps, au plus de quelques secondes, est à déterminer en fonction de la puissance de l’éclairage. Le positif est ensuite développé.

Autour du sténopé

À la recherche des mots "sténopé" et "pinhole" sur la toile, on trouve, en sus des techniques évoquées précédemment, le récit et l’analyse de nombreux ateliers menés avec des élèves et des adolescents, souvent conduits par des artistes dans le cadre des centres d’art, par exemple ceux animés par Ilan Wolff, Remi Guerrin ou Guillaume Pallat au Centre Photographique d’Île-de-France, par Aurélie Le Gall, les associations Oscura et Lucerna. Avant l’utilisation d’un sténopé avec des élèves, une visite de ces sites peut enrichir les pistes de travail et ouvrir de nombreuses perspectives sur la photographie de la ville. On pourra aussi découvrir de nombreuses pratiques du sténopé sur les sites d’échange et de discussion comme Flickr. La visite de ces sites conduit à une nouvelle attention à l’œuvre d’Atget : temps de pose, flou, vide, vignettage.
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