L'époque carolingienne

 

Cet équilibre de chasse, pêche et cueillette a certes évolué, mais très lentement, d'autant plus que les Ve, VIe et VIle siècles ont encore été très troublés, notamment du fait des rivalités meurtrières entre les descendants de Clovis. Avec l'avènement des Carolingiens commence une ère relativement plus paisible, et donc plus propice au développement des campagnes.

    Le développement agricole


Petit à petit, des terres ont été mises en culture, si bien que, au IXsiècle, dans les grands domaines, les champs occupaient non plus, comme précédemment, quelques dizaines, mais plusieurs centaines d'hectares.
Grâce au renouveau de l'écrit à l'époque carolingienne, on est beaucoup mieux renseigné sur cette période que sur les siècles antérieurs. En particulier, on dispose de documents remarquables, appelés polyptyques, qui décrivent, souvent avec minutie, l'état de diverses grandes propriétés, et qui permettent de savoir comment étaient exploités les grands domaines possédés par les puissants de ce temps : le roi et l'aristocratie, tant laïque qu'ecclésiastique.

L'organisation d'un grand domaine




La superficie d'un grand domaine, d'une villa comme on disait alors, pouvait être très variable : de quelques centaines à plusieurs milliers d'hectares. Ainsi, une villa située au sud-est de Bruxelles s'étendait sur environ 18 600 hectares ; ce quadrilatère de 2 à 5 kilomètres de côté sur 25 kilomètres de long formait sans doute la plus grande villa dont on ait gardé le souvenir.
Le fait remarquable est que chaque villa comprenait deux parties distinctes, mais complémentaires. D'une part, il y avait la "réserve", c'est-à-dire les terres dont les revenus étaient réservés au propriétaire et qui se composaient non seulement de champs cultivés, mais aussi de vignes, de bois, de pacages, parfois d'étangs et de marécages. D'autre part existait un ensemble d'exploitations de taille relativement modeste occupées par des tenanciers, c'est-à-dire par des paysans libres et non libres, plus ou moins dépendants du propriétaire.
Les champs et les vignes de la réserve étaient cultivés partiellement par une main-d'œuvre servile, qui recevait du maître le gîte et le couvert. Mais l'essentiel du travail était accompli par les tenanciers qui devaient, pour la plupart, trois jours par semaine de travail sur la réserve : c'étaient les célèbres "corvées". Les tenanciers participaient ainsi aux labours, aux semailles et, bien entendu, à la moisson, qui constituait la plus lourde des tâches du paysan ; en outre, ces tenanciers devaient faire les clôtures dont on entourait les champs pour empêcher le bétail d'y pénétrer ; ils devaient aussi s'occuper du transport des récoltes, du vin, du bois, etc.

 
 

D'autres charges encore pesaient sur les tenanciers, à savoir des redevances le plus souvent en nature : blé, lin, vin, poulets, œufs. Ces revenus constituaient à la fois le loyer pour l'occupation de la tenure, et le prix des droits de jouissance accordés aux tenanciers dans les bois, landes et friches diverses de la réserve : les tenanciers pouvaient ainsi envoyer leurs porcs à la glandée dans le bois, et se procurer du bois de chauffage.

   

Le système du grand domaine tel qu'il vient d'être esquissé s'est développé essentiellement entre Loire et Rhin, c'est-à-dire dans l'espace non seulement conquis, mais encore vraiment occupé par les Francs : c'est là que se sont installés de préférence les rois et les aristocrates mérovingiens et carolingiens, tant laïques qu'ecclésiastiques.
Ailleurs, au sud de la Loire, les grandes propriétés étaient ou bien cultivées en faire-valoir direct par une main-d'œuvre servile, ou bien fragmentées en petites unités d'exploitation mises en valeur par des paysans libres, qui devaient certes un loyer au propriétaire, mais qui n'étaient astreints à aucune corvée.

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