Horace Lecoq de Boisbaudran (1809-1897) Il fut admis aux Beaux-Arts en 1819 où il fut l’élève de Peyron et de Guillon Le Thière. Il exposa au Salon de 1831 à 1840 et devint professeur aux Beaux-Arts. L’enseignement qu’il donna lui permis d’observer l’importance de la mémoire dans l’étude et la pratique des arts du dessin. Jugeant que cette faculté n’avait pas fait l’objet jusque-là d’aucune culture spéciale et méthodique, il entreprit la rédaction d’un ouvrage intitulé L’éducation de la mémoire pittoresque qu’il publia en 1862.
  

Les extraits sont issus d’une édition précédée d’une lettre d’Auguste Rodin datée du 19 novembre 1913, publiée à Paris par l’éditeur Henri Laurens.
  
P.22 :

" Procédant du simple au composé, le commençant doit donc apprendre par cœur et reproduire les formes les plus simples, des lignes droites même pour s’exercer seulement d’abord au souvenir des grandeurs ; puis viennent des formes de difficultés graduées et les exercices se compliquent de plus en plus, on doit joindre à la forme l’effet et le modelé et aborder enfin le relief et les objets naturels. En même temps, et dans une progression inverse, on doit diminuer de plus en plus le temps pendant lequel le modèle est laissé à l’élève, afin qu’il puisse s’en bien pénétrer. ".

   
p.26 :

" Le sujet de la première leçon fut le détail de figure le plus simple, un nez vu de profil, et quelques jours furent donnés pour l’apprendre. Après avoir fait remarquer les particularités de la forme propres à la fixer dans la mémoire et avoir expliqué la construction anatomique nasale, j’engageai chacun à apprendre cette leçon d’un nouveau genre comme il avait pu faire autrefois de ses fables ou de sa grammaire, soit qu’il répétât souvent chaque phrase, soit surtout qu’il en pénétrât bien le sens. Chacun enfin dut, par la répétition et par la réflexion, étudier et retenir avec la plus grande exactitude son modèle, grandeur et teinte. Mais je m’abstins de prescrire une marche trop uniforme, afin de laisser un champ plus libre à la spontanéité et aux procédés individuels.
   
Au jour convenu, chacun me remit le modèle qui lui avait été donné et se mit à le dessiner sans autre guide que le souvenir. Ce premier essai donna déjà des résultats de nature à encourager le maître et les élèves. ".

   
" Le premier modèle fut remplacé par un autre d’un degré plus difficile, et passant ainsi par une suite de gradations calculées, il fut possible au bout de trois mois d’aborder de petites têtes dont la ressemblance, ainsi que les détails de la coiffure et d’ajustement, furent rendus d’une manière vraiment satisfaisante. ".

  
P.27 :

" Je restai persuadé aussi que la figure humaine est comparativement plus facile à la mémoire que tous les autres objets : fleurs, ornements, animaux, etc.. Il semble qu’il existe entre l’homme et son image une sympathie qui l’intéresse, des affinités qui le saisissent. Pour une personne même non exercée, une tête humaine se particularise au premier aspect, tandis que des têtes d’animaux d’une même espèce lui semblent toutes avoir la même physionomie. ".

   
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