Norme ou pas Dans ses Carnets, Léonard de Vinci décrit les proportions de la figure humaine. À la manière d’un " portrait-robot " qui serait à élaborer, suivez les indications données par l’artiste afin de dessiner l’homme ainsi détaillé.

  


Physionotrace dessiné par Quenedey
Les dessins réalisés se ressemblent-ils bien qu’un texte unique en soit à l’origine ? Le dessin obtenu l’a-t-il été aussi facilement que la précision de la description pouvait le laisser supposer ?
De la diversité des résultats, des impossibilités ou des incompréhensions ou, à l’inverse, des approches rendues plus aisées grâce à une description rigoureuse, définissez les relations qu’il est possible d’entretenir aux normes ainsi fixées : devons-nous les suivre " au pied de la lettre ", les interpréter, jouer avec elles, les oublier ou... les fuir ?
  
Ce travail initié par le dégagement, par Léonard de Vinci, de la " norme ", puis le respect de celle-ci par celui qui dessine en suivant les indications, peut déboucher sur :
  
La recherche d’établissement de " normes "

Figures. De la prolongation du corps humain, Albrecht Dürer
L’artiste Gérard Audran (1640-1703), qui grava nombre de planches d’après Le Brun, Poussin et Le Sueur, mesura un nombre considérable de statues antiques dans toutes leurs parties afin d’en extraire des données facilitant l’obtention de l’harmonie dans le cadre de la représentation du corps humain. Cette démarche rejoint les croquis d'Albrecht Dürer sur les proportions du corps humain ou les recherches de Jean Cousin dans son livre de portraiture.
   
Transposez cette démarche dans un cadre plus actuel en obtenant le " portrait " d’une personne uniquement grâce au report sur une feuille des mesures de chaque détail de son visage. Vous pouvez conserver l’emplacement et l’espacement de ces composants ou bien les classer selon des critères variables : les disposer sous forme de liste, de tableau à deux entrées... ou encore mettre ensemble tous les éléments de moins de 5 cm, mettre en couleur ceux qui possèdent plus de 5 cm, etc..
  
  


Têtes raccourcies de front, Jean Cousin
L’objectif est de s’éloigner d’une représentation établie sur la ressemblance et l’expression du visage. Il s’agit de parvenir à aborder le visage selon des données objectives, vérifiables et quantifiables, mais dont la prise en compte transforme de manière radicale, aussi bien l’apparence que les modalités de la représentation.
   
Des démarches d’artistes contemporains peuvent servir de référents :
   
- Rémi Zaugg réalisa " Trois esquisses perceptives du tableau de La maison du pendu peint par Cézanne en 1872-73 " (cf. Revue de littérature générale, 95/1, la mécanique lyrique, POL, 1995). À la texture, à la couleur et au trait de l’œuvre originale, il substitua des mots.
   
- S’intéressant à une œuvre du même artiste de la fin du XIXe siècle, Roy Lichtenstein réalisa en 1962 un Portrait de Madame Cézanne possédant des parentés avec le schéma ou le relevé. Il créa de la sorte une œuvre " à partir de..." ou " avec " l’analyse plastique d’une autre œuvre.
   
- Dans un tout autre registre, l’artiste Cindy Sherman (née en 1954) réalise des portraits la rendant souvent méconnaissable (ce qui interroge, entre autres, la définition de l’" autoportrait " puisqu’elle joue à le détourner). Elle se déguise, se maquille et utilise parfois des prothèses afin de se mettre en scène à des époques et dans des situations différentes.
  
Le refus de la " norme "
Après avoir pris connaissance du texte de Léonard de Vinci, réalisez le plus de portraits en jouant précisément sur tous les éléments du visage qui peuvent varier d’une personne à une autre. Il s’agit ainsi de travailler le "même " et " l’autre ". Utilisez le tracé, mais aussi l’ombre et la lumière, ainsi que la couleur et la matière. Le format et le support peuvent également entrer dans le travail " hors norme " ainsi amorcé.
La confrontation de l’ensemble des réalisations fera apparaître qu’il peut subsister des constantes, que des normes réussissent à nouveau à être dégagées ou qu’au contraire une certaine " déconstruction " est en marche...
Le prolongement de l’élaboration plastique s’engage à partir de tels repérages afin, par exemple, de les accentuer : ainsi est-il possible de travailler jusqu’à l’obtention d’un portrait se tenant à la limite de ce qui lui permet d’en être un.
  

Richard Hamilton, Dieter Roth. Interfaces, Richard Hamilton
   
Vous pouvez prolonger la réflexion avec J.M. Schaeffer" Le portrait photographique est-il encore possible..... ou par le jeu
   
Entre l'homme et l'animal des rapprochements sont possibles. Le Brun a ainsi imaginé une typologie des tempéraments humains fondés sur les ressemblances.  Quelles sont les limites d'une telle démarche ? Recherchez à l'inverse dans le dessin animé des rapprochements entre l'homme et l'animal sans prétentions normatives ?
   

Têtes de bœuf et d'hom-
me, Charles Le Brun
Têtes de chèvre et d'hom-
me, Charles Le Brun
Têtes de sanglier et d'hom-
me, Charles Le Brun
    
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