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 |  | Madame
    de La Fayette, La Princesse de Clèves  Elle passa tout le jour des fiançailles chez elle à se parer, pour se trouver le soir au bal et au festin royal qui se faisait au Louvre. Lorsquelle arriva, lon admira sa beauté et sa parure ; le bal commença et, comme elle dansait avec M. de Guise, il se fit un assez grand bruit vers la porte de la salle, comme de quelquun qui entrait et à qui on faisait place. Mme de Clèves acheva de danser et, pendant quelle cherchait des yeux quelquun quelle avait dessein de prendre, le roi lui cria de prendre celui qui arrivait. Elle se tourna et vit un homme quelle crut dabord ne pouvoir être que M. de Nemours, qui passait par-dessus quelques sièges pour arriver où lon dansait. Ce prince était fait dune sorte quil était difficile de nêtre pas surpris de le voir quand on ne lavait jamais vu, surtout ce soir-là, où le soin quil avait pris de se parer augmentait encore lair brillant qui était dans sa personne ; mais il était difficile aussi de voir Mme de Clèves pour la première fois sans avoir un grand étonnement. M. de Nemours fut tellement surpris de sa beauté que, lorsquil fut proche delle, et quelle lui fit la révérence, il ne put sempêcher de donner des marques de son admiration. Quand ils commencèrent à danser, il séleva dans la salle un murmure de louanges. Le roi et les reines se souvinrent quils ne sétaient jamais vus, et trouvèrent quelque chose de singulier de les voir danser ensemble sans se connaître. Ils les appelèrent quand ils eurent fini sans leur donner le loisir de parler à personne et leur demandèrent sils navaient pas bien envie de savoir qui ils étaient, et sils ne sen doutaient point. Il se rangea derrière une des fenêtres, qui
    servaient de porte, pour voir ce que faisait Mme de Clèves. Il vit quelle
    était seule ; mais il la vit dune si admirable beauté quà peine fut-il
    maître du transport que lui donna cette vue. Il faisait chaud, et elle navait rien,
    sur la tête et sur sa gorge, que ses cheveux confusément rattachés. Elle était sur un
    lit de repos, avec une table devant elle, où il y avait plusieurs corbeilles pleines de
    rubans ; elle en choisit quelques-uns, et M. de Nemours remarqua que cétaient
    des mêmes couleurs quil avait portées au tournoi. Il vit quelle en faisait
    des nuds à une canne des Indes, fort extraordinaire, quil avait portée
    quelque temps et quil avait donnée à sa sur, à qui Mme de Clèves
    lavait prise sans faire semblant de la reconnaître pour avoir été à M. de
    Nemours. | |
| La princesse
    de Clèves,1678. | ||||
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| |L'héroïne de roman| |