Héritiers d’Icare et de Jason, les aventuriers
et explorateurs, combattants de l’impossible, se lancent des
défis et vainquent ou perdent la vie. La geste de ces héros "de
l’extrême", parfois entachée d’orgueil,
de folie ou d’inconscience, se mesure en exploits, toujours
chèrement payés et qui ne valent qu’en étant
le premier ou l’inégalé. Passion et conviction
d’un solitaire, entreprise sponsorisée par un milliardaire
ou tension volontaire de toutes les énergies d’une grande
puissance en compétition pendant la guerre froide, ces prouesses
ont l’univers entier comme champ d’action.
Youri Gagarine, cosmonaute et héros de l’Union soviétique,
devient le 12 avril 1961 le premier homme à voyager dans l’espace.
Et le 21 juillet 1969, devant un milliard d’êtres humains
rivés à leur écran de télévision,
parvient de la Lune la réponse des États-Unis d’Amérique
au défi de la conquête spatiale : Neil Armstrong
pose le pied sur le satellite de la planète Terre, dans la
Mer de la tranquillité. Le film d’anticipation Destination
Moon de Robert Heinlein était sorti en 1950, l’album
d’Hergé, Objectif Lune, en 1953. Dans le domaine de
l’astronautique et de l’aéronautique, l’aventure
est toujours assortie d’héroïsme, depuis le premier
vol officiel d’Alberto Santos-Dumont, à Bagatelle, en
1906, puis Lindberg, Mermoz, Hélène Boucher, en passant
par les as, les pilotes d’essai – ceux qui ont l’ "étoffe
des héros" –, et jusqu’aux records des pilotes
de planeurs qui battent des records de vitesse et de distance sans
carburant. Ainsi l’Allemand Klaus Ohlmann a réalisé,
en janvier 2006, un vol en planeur de 3 026 km en 14 heures, le long
de la Cordillère des Andes.
L’alpinisme se développe au XIXe siècle mais
c’est aussi dans les années 1950 et 1960 que les sommets
de l’Himalaya, dépassant les 8 000 m sont tous conquis,
par Edmund Hillary et Tensing Norgay (Everest, 1954), et d’autres,
dont les Français Lionel Terray, Maurice Herzog, Louis Lachenal… Roger
Frison-Roche, alpiniste et explorateur, fait rêver, à la
même époque, d’innombrables lecteurs, avec ses
livres traduits dans de nombreux pays. En 1970, l’Italien Reinhold
Messner est le premier à enchaîner la conquête
(la collection) des quatorze sommets du Toit du monde, qu’il
boucle en 1986.
L’aventure est de tous les sommets, déserts, jungles,
océans, partout où l’homme et, aujourd’hui,
la femme parviennent à marcher, traverser, s’équiper
pour vaincre la nature, ou aller au bout d’eux-mêmes.
Et les héros de fiction Indiana Jones ou Bob Morane voisinent
dans le panthéon des aventuriers avec Éric Tabarly,
Gérard d’Aboville, Alain Bombard ou Isabelle Autissier.
Quant au monde sous-marin, si nul n’ignore en France le nom
du commandant Cousteau et de la Calypso, si le film d’Éric
Besson, Le Grand Bleu, sorti en 1988, eut un énorme succès
auprès du public adolescent, rappelons que le Suisse Auguste
Piccard, qui conçoit en 1945 le premier bathyscaphe et réalise,
dans le Pacifique, à l’âge de 76 ans, le record
mondial de plongée sous-marine, à 10 916 m, a servi
de modèle à Hergé pour le professeur Tournesol,
constructeur du sous-marin permettant de retrouver l’épave
de La Licorne. Ainsi fiction et réalité ne cessent-ils
de s’enrichir mutuellement et de nourrir nos imaginaires.