Si les photographies
montrent plusieurs travailleurs, dans la série, il n’y
a aucune photographie de collectif ouvrier important, aucune photographie
d’atelier ou d’usine, pourtant nombreuses dans les cartes
postales de l’époque. La série comporte quelques
photos de groupes (« marché aux timbres-poste », « théâtre
de Guignol », « voyageurs et curieux attendant
le métropolitain », « fête »),
mais elles sont plus à considérer comme des photographies
de foule ou de chalands liés par un événement,
un commerce de rue, que par un collectif de travail.
La collection s’intéresse à l’outil, à l’objet
du métier, à sa production, toujours aussi présent,
souvent même plus que le travailleur qu’il cache partiellement.
L’accent est mis sur le geste, sur le rapport du travailleur à son
outil de travail, les échanges de gestes entre le travailleur
et son client. Plusieurs photographies – temps de pose ? – montrent
le travailleur au repos ou en attente.
Eugène Atget revisite ici une tradition picturale ancienne,
celles des estampes sur les métiers. Une visite de l’exposition
Abraham
Bosse, des liens sur les métiers et
cris de Paris, et des nombreux sites sur le sujet, permet par la
comparaison d’étudier les poses,
les postures des corps dans l’espace.
L’élargissement à la sélection de près
de 140 photographies de l’album « Vies et petits métiers à Paris » extraites
de la série « Paris pittoresque », montre
un thème bien délimité et très homogène
dans le temps, toutes les photographies ont été prises
entre 1898 et 1900, mais une certaine hétérogénéité dans
le traitement des métiers.
De
taille à peu près semblable (environ 16,5-18 cm x 21-22,5
cm) en raison de la dimension du négatif verre, les photographies
se présentent tantôt verticales, tantôt horizontales,
le même métier pouvant donner lieu à des formats
et des compositions fort différents. Quelques exemples comme
la série des clochards, des marchands de légumes ou des
fleuristes permettent d’étudier cette diversité.
Le choix de métiers représentés plusieurs fois permet
dans un tableau de dresser un répertoire des gestes, des attributs
(outil, objets vendus, accessoires de transport, vêtements, etc.),
des mises en scène spécifiques de chacun des métiers,
de vérifier leur présence dans des reproductions plus anciennes
(estampes) ou contemporaines (cartes postales). Peut-on parler, à propos
du travail d’Atget, de stéréotypes ? Cette première
démarche conduit à confronter l’œuvre d’Atget
et celle d’August Sander : le cadrage,
le fond, la mise en scène du sujet, l’angle de prise de
vue, la série. Elle introduit à la réalisation d’un
album avec un artiste ou un photojournaliste.