Le regard sur la ville est déambulation, flânerie
et arrêt, mouvement et fixité, attention aux détails
et aux changements.
La photographie de ville dit que quelque chose quelque part a été (Roland
Barthes, p. 119-122), ou plutôt que "ça été joué".
La photographie a à voir avec la mémoire, avec la
perte, avec la disparition.
La photographie de la ville, contrainte par les possibilités
de recul en fonction de l’architecture, de l’urbanisme
et des circulations, est d’abord le choix de la "bonne
distance" pour obtenir le cadrage souhaité selon
l’angle de prise de vue et le point de vue désirés.
Quelques textes ouvrent une première correspondance avec
l’œuvre d’Atget. Ainsi Arthur Trottenberg accompagne
des photographies de la collection Eugène Atget de Bérénice
Abbott d’extraits de Marcel Proust. À quelques décennies
des prises de vue d’Eugène Atget, Georges Perec pourrait
bien dialoguer avec lui.
Le type du flâneur remonte au début du XIXe siècle.
La deuxième moitié du XIXe siècle
et le XXe sont riches de philosophes, de peintres,
d’auteurs, de cinéastes qui ont fait de l’image de
Paris, de la promenade, de l’errance, de l’itinéraire
urbains, de la curiosité pour les rues parisiennes et les endroits
insolites, du souvenir pour les lieux disparus ou appelés à disparaître,
la matrice de leur œuvre. Espaces à découvrir, espaces à conquérir, à construire
aussi, lieux de l’évidence et du doute, lieux fragiles qu’évoque
Georges Perec dans les dernières pages d’Espèces
d’espaces.
Parce que le jeu des correspondances est ouvert, il exige une attention fine
au(x) sens et aux dates, plus encore à l’intransigeance d’Atget
dans son œuvre. D’emblée se confrontent les logique de la
déambulation, de l’errance, chère aux surréalistes
ou celles de la documentation du lieu, du quartier plus proches de la démarche
d’Atget.